Le Tchad a revendiqué samedi une «victoire décisive» sur les rebelles venus du Soudan après deux jours de combats meurtriers, et a menacé de rompre ses relations diplomatiques avec Khartoum tout en critiquant vertement l'Union africaine (UA).  

«C'est une victoire décisive. Ils (les rebelles) mettront deux à trois ans avant de pouvoir se reconstituer» a affirmé samedi à l'AFP le ministre tchadien de la Défense par intérim, Adoum Younousmi.

Outre la stratégie militaire, le ministre a attribué cette victoire «à la professionnalisation de l'armée et notre équipement». Selon une source militaire française, le président Idriss Deby Itno s'est considérablement renforcé depuis l'offensive rebelle qui avait failli le renverser en février 2008.

Le gouvernement tchadien avait fait état vendredi soir d'un bilan «provisoire» de 247 morts (225 rebelles, 22 militaires) et 212 insurgés capturés jeudi et vendredi après les combats au sud d'Abéché.

Le ministre a également donné une estimation de l'armée des forces rebelles: «le volume des mercenaires est estimé à 3 à 4.000 hommes avec 300 à 400 véhicules». Les rebelles avaient ces derniers jours donné à l'AFP des chiffres faisant état du double de véhicules.

L'Union des forces de la résistance a qualifié de fantaisiste le bilan gouvernemental estimant avoir pris le dessus lors des combats de la semaine. L'UFR se targue notamment d'avoir détruit ou récupéré plus d'une centaine de véhicules dont une vingtaine de chars et d'avoir fait plus de 200 prisonniers en tout en ayant perdu que 5 hommes.

Ces chiffres, dont certains paraissent peu crédibles, sont réfutés par les autorités.

 «C'est calme. Il n'y a pas eu de combats», a déclaré samedi une source au sein de l'Union des forces de la résistance (UFR), la coalition des principales factions rebelles tchadiennes, jointe depuis Libreville.

 «On ne va pas changer d'objectif. C'est toujours N'Djamena», a ssuré la source de l'UFR.

Sur le plan diplomatique, le président tchadien Idriss Deby Itno a affirmé samedi soir qu'il envisageait de rompre les relations diplomatiques avec Khartoum «le moment venu».

Il a indiqué sa volonté de «fermer les Centres culturels soudanais» et de «reprendre les écoles soudanaises».

«Les enseignants (de ces écoles) qui ne sont autres que des agents de renseignement (du Soudan) doivent regagner leur pays», a décidé le président.

M. Deby a précisé que «le Tchad soutiendrait ouvertement la CPI», la Cour pénale internationale qui a lancé un mandat d'arrêt international contre le président soudanais Omar el-Béchir pour crimes de guerre au Darfour.

Le président tchadien envisage par ailleurs «de retirer sa confiance à l'Union Africaine» pour «confier la résolution de la crise aux seules Nations Unies».

Il reproche au bloc régional son «incapacité à trouver des solutions».

Si l'UA a «fermement» condamné l'attaque rebelle, elle n'a en effet pas voulu citer nommément le Soudan, se limitant à affirmer que «les Etats membres ne (devaient) pas servir de base arrière ou soutenir des mouvements rebelles».

   Un leader de la rébellion tchadienne, Mahamat Tourki Nouri, a réagi samedi aux nombreuses condamnations par la communauté internationale de l'offensive rebelle.

 «Les diplomates, qu'ils soient de l'Union européenne (UE) ou de l'Union africaine, doivent doser leurs propos et chercher à situer les responsabilités dans cette crise pour mieux aborder et assimiler le problème tchadien», a déclaré M. Nouri joint depuis Libreville.

«Deby est le malfaiteur principal dans cette crise: il l'a créée, l'anime et baigne dedans», a-t-il dit.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné à l'unanimité vendredi l'offensive des rebelles tchadiens dans une déclaration rédigée par la France. Le Conseil «exige que les groupes armés rebelles cessent immédiatement la violence».