Le Congrès national africain (ANC) a remporté une majorité absolue lors des élections générales en Afrique du Sud, permettant au chef de ce parti Jacob Zuma d'accéder à la présidence d'un pays toujours miné par une immense pauvreté, quinze ans après la chute de l'apartheid.

Avec 99% des bulletins dépouillés, l'ancien mouvement de lutte contre l'apartheid a remporté 11,6 millions de voix, soit plus de la moitié des 23 millions d'électeurs inscrits, a indiqué dans la nuit de vendredi à samedi la commission électorale.

Son principal rival, l'alliance démocratique (DA, ex-opposition sous l'apartheid) obtient pour sa part 16,54% des voix, contre 7,42% des voix pour le Congrès du Peuple (Cope), formé en décembre par des dissidents de l'ANC après la démission forcée de l'ex-président Thabo Mbeki. Les autres partis se partagent les voix restantes.

Le chef de file de l'ANC, Jacob Zuma, se voit ainsi assuré de devenir le quatrième président noir d'Afrique du Sud.

Anticipant ces résultats, des milliers de partisans du tribun zoulou Jacob Zuma se sont rassemblés dès vendredi soir dans plusieurs villes du pays pour célébrer la victoire aux élections du 22 avril de l'ANC, au pouvoir depuis les premières élections multiraciales de 1994.

A Durban, la capitale du Kwazulu-Natal sur l'Océan indien (est), et à Johannesburg, la fête battait son plein, des milliers de partisans chantant et dansant dans les rues. «Zuma à Pretoria», clamaient des supporteurs impatients, en référence au siège de la présidence.

«Nous avons sans conteste possible reçu le mandat du peuple», a déclaré la porte-parole de l'ANC, Jesse Duarte. Le parti est cependant en léger recul par rapport à son score de 2004 (69,7%).

Le nouveau Parlement élira le président de la République en session extraordinaire le 6 mai. Zuma devrait prêter serment à Pretoria le 9.

La presse n'a pas attendu non plus pour saluer à l'unanimité le «raz-de marée» ANC. Le parti a «confirmé l'ampleur de son soutien malgré de nombreux défis de la campagne», soulignait vendredi le quotidien The Times.

Outre l'apparition du Cope, le parti a dû batailler contre les doutes sur l'intégrité de Zuma, qui a bénéficié in extremis d'un abandon de poursuites pour corruption à son encontre.

«Jacob Zuma et l'ANC ont mené une campagne brillante et réussi à faire passer les élections de 2009 pour un duel entre les riches noirs et blancs d'un côté, et la grande majorité des pauvres noirs de l'autre», analysait l'hebdomadaire Mail and Guardian.

Zuma, orphelin de père et fils d'une femme de ménage, «a fait en sorte de s'identifier à la marginalisation des pauvres», poursuivait le journal. Mais, attention, «ils se retourneront contre lui s'il échoue à répondre aux attentes.»

L'Afrique du Sud est la première économie du continent, mais plus de 43% de sa population vit sous le seuil de pauvreté et le chômage frôle les 40%. Des statistiques susceptibles d'empirer alors que le pays entre en récession pour la première fois depuis 17 ans.

Autres fléaux: 50 homicides sont recensés quotidiennement et le pays compte le plus grand nombre de séropositifs au monde: 5,5 de ses 48 millions d'habitants.

«Le plus grand défi pour Zuma réside dans les espoirs de la classe ouvrière et des pauvres, qui sont en grande partie derrière le phénomène Zuma», renchérissait l'analyste Aubrey Matshiqi, dans le quotidien The Star.

«Ces électeurs ont (...) l'espoir d'être sauvés par Zuma, un homme à qui ils ont donné leur soutien parce qu'il a la même origine qu'eux», poursuivait le chercheur. «Mais la réalité est que l'Etat post-apartheid n'est pas en mesure de répondre à leurs aspirations dans un futur proche.»