Laura Archer est libre. Après trois jours d'angoisse, l'infirmière montréalaise a finalement été relâchée, samedi, avec trois autres travailleurs de Médecins sans frontières (MSF).

Les rumeurs émanant de sources diplomatiques couraient depuis plusieurs heures, mais la nouvelle a finalement été confirmée par l'organisme humanitaire en début d'après-midi. C'est donc dire que Mme Archer, 31 ans, un médecin italien, un coordonnateur français et un agent de sécurité soudanais retrouveront leurs familles dans les prochaines heures.

«Tout va bien, on n'a pas été maltraités», a déclaré l'otage français, Raphaël Meunier, aux journalistes rassemblés sur le tarmac de l'aéroport d'El-Facher, au Darfour-Nord. C'est là que le groupe a atterri après avoir été relâché. Il devait par la suite gagner la capitale Khartoum.

Vêtue d'une chemise carreautée, les traits tirés, Laura Archer s'est montrée plus laconique que son confrère. «Je suis d'accord avec Raphaël (Meunier), il a parlé pour l'équipe», a-t-elle simplement déclaré. Elle devrait bientôt s'envoler pour la Belgique, où elle retrouvera sa famille.

Les otages ont entretenu des contacts fréquents avec MSF pendant leur rapt, a confirmé la présidente de la section canadienne de l'organisme, Johanne Liu. Elle assure qu'ils ont été bien nourris, qu'ils avaient accès à des matelas, et qu'ils n'ont subi aucune forme de violence.

Le copain de l'infirmière, Carlos Bernaquez, n'était pas disponible pour commenter l'affaire. Et ses parents, Ted et Barbara Archer, n'ont pu être joints à leur domicile de Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard. Dans un communiqué, ils se sont toutefois dits «extrêmement soulagés» de ce dénouement heureux.

«Nous sommes très fiers de Laura, ont-ils écrit. Si quelqu'un pouvait bien réagir dans une situation pareille, c'est bien elle.»

«Ça semblait rassurant, jusqu'à un certain point, a confié Benoît Émond, un ami qui a déjà participé à une mission humanitaire avec l'infirmière. Ils avaient donné des nouvelles, ils étaient bien traités et ça semblait vouloir se résoudre rapidement. C'est rassurant que ce soit terminé après quelques heures seulement.»

Laura Archer en était à sa troisième mission avec Médecins sans frontières. Elle avait notamment participé à des mandats en République centrafricaine et en République démocratique du Congo. Elle est aussi artiste. En août dernier, elle a monté sa première exposition, des portraits de réfugiés qu'elle avait rencontrés en Afrique.

En mission au Soudan depuis octobre, elle faisait partie d'une unité de soins mobile qui sillonnait les villages du nord-ouest du Darfour pour soigner des malades.

Selon le gouverneur du Nord-Darfour, l'enlèvement de mercredi serait attribuable à un groupe favorable au président soudanais Omar el-Béchir, visé depuis peu par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI). Les Aigles d'el-Béchir demandaient une rançon à l'origine, mais aucune ne leur a été versée, selon Médecins sans frontières.

«On ne sait même pas pourquoi ils ont été kidnappés», a déclaré un porte-parole de la section belge de MSF, Michel Peremans.

Depuis le rapt, mercredi, Médecins sans frontières a rapatrié la plupart de ses 70 employés étrangers, et fermé 5 de ses 12 missions dans cette région troublée du Soudan. L'organisme a du coup mis fin à la campagne de vaccination contre la méningite.

«C'est un signe évident de l'augmentation en flèche de l'insécurité dans ce contexte-là», a dénoncé Johanne Liu.

Le 4 mars, la Cour pénale internationale a lancé un mandat d'arrêt contre le président soudanais Omar el-Béchir. Le tribunal veut l'inculper pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Dès le lendemain, les autorités ont expulsé 13 organisations humanitaires, les accusant de complicité avec la CPI.

Dans les prochains jours, MSF révisera de fond en comble ses activités au Soudan.

La guerre civile qui oppose des rebelles aux milices pro-gouvernementales a fait 300 000 morts et 2,7 millions de déplacés au Darfour depuis cinq ans. Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), c'est le théâtre de la plus importante mission humanitaire au monde.

- Avec AFP