De nombreuses personnes ont péri en 48 heures lors de violences post-électorales opposant chrétiens et musulmans à Jos, dans le centre du Nigeria, selon des sources sur place dont l'une a fait état de 381 morts, un chiffre qui n'a pas été confirmé de source officielle.

Selon le correspondant local de Radio France Internationale (RFI) à Jos, Aminu Manu, 381 cadavres ont été entreposés dans une mosquée afin que des habitants puissent venir identifier d'éventuels proches. «J'étais à la mosquée centrale cet après-midi et j'y ai compté 378 cadavres, mais au moment où je m'apprêtais à sortir, trois autres corps ont été apportés», a déclaré le journaliste à l'AFP. Vendredi, un journaliste du quotidien nigérian The Punch, également sur place, a indiqué avoir vu 55 morts dans trois hôpitaux.

La police, l'armée et le gouvernement fédéral du Nigeria n'ont pas communiqué de bilan samedi en fin d'après-midi et n'étaient pas joignables.

Jos, la capitale de l'État de Plateau, a été le théâtre vendredi et samedi d'émeutes post-électorales opposant musulmans et chrétiens se disputant la victoire d'une élection locale qui s'est déroulée jeudi.

Le gouverneur de l'État, Jonah Jang, a ordonné samedi un couvre-feu de 24 heures dans quatre quartiers de la ville et donné l'ordre à l'armée d'ouvrir le feu sur toute personne ne respectant pas cette mesure, a rapporté Radio Plateau.

«Des centaines de personnes ont été tuées ces deux derniers jours (...) des restes de corps calcinés jonchent certains quartiers de la ville, c'est terrible», a déclaré à l'AFP un représentant de l'église chrétienne à Jos, Yakubu Pam.

La Croix-Rouge nigériane n'était pas en mesure de fournir dans l'immédiat un bilan des morts, mais selon son directeur local, Dan Tom, «il y a des corps dans la rue qui n'ont pas encore été évacués».

Il a indiqué craindre des épidémies si les corps n'étaient pas enlevés.

«Plus de 10 000 personnes ont été déplacées de chez elles et tentent de se réfugier dans des églises, des mosquées et des baraques de l'armée et de la police», a poursuivi M. Tom, précisant que ces personnes n'avaient ni eau ni nourriture.

Au QG de la police de Jos, environ 350 jeunes, chrétiens comme musulmans, étaient détenus pour avoir pris part aux affrontements, a indiqué Aminu Manu.

Des églises et des mosquées ont été prises d'assaut et des maisons ont été détruites lors des émeutes.

Le correspondant de RFI a également indiqué avoir vu une centaine de personnes blessées par balle qui affirmaient avoir été blessées par des tirs de la police et de l'armée.

Le président nigérian Umaru Yar'Adua a ordonné vendredi soir à l'armée de se déployer à Jos, dans un bref communiqué où il s'est déclaré «attristé» par les évènements.

Les violences ont été déclenchées vendredi par une rumeur selon laquelle le Parti de tous les peuples nigérians (ANPP) avait perdu face au parti au pouvoir au niveau fédéral, le Parti Démocratique du Peuple (PDP), selon un porte-parole de la police.

L'ANPP est traditionnellement perçu comme une formation majoritairement musulmane et le PDP, majoritairement chrétienne.

L'accès nord à Jos par la route était bloqué samedi, a constaté un correspondant de l'AFP, et il n'était pas possible de pénétrer dans la ville par voie aérienne.

En septembre 2001, la capitale provinciale avait déjà été le théâtre de violents affrontements entre chrétiens et musulmans, pendant une semaine, faisant des centaines de morts.