Des soldats ont pillé dans la nuit un camp de réfugiés du Congo-Kinshasa, tirant des coup de feu et dépouillant les personnes affamées et traumatisées qui avaient fui les combats dans l'est du pays, selon des témoins.

D'après plusieurs témoignages recueillis lundi par l'Associated Press, une femme a été tuée par une balle perdue dimanche soir alors que les soldats allaient de maison en maison et de tente en tente à Kibati, un village situé au nord de la capitale provinciale du Nord-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), qui a été envahi par quelque 70 000 réfugiés.

Menaçant les réfugiés de leurs armes, les soldats se sont emparés de leurs maigres possessions, provenant pour beaucoup de l'aide distribuée par les organisations humanitaires.

Les réfugiés de Kibati font partie des quelque 250 000 personnes qui ont fui les combats entre les troupes gouvernementales et les forces rebelles de Laurent Nkunda depuis l'intensification des violence au mois d'août.

Patrice Sebahunde, 60 ans, a dit avoir été réveillé vers 22h dimanche soir par quatre soldats qui l'ont menacé de leurs armes et ont pris la nourriture de sa famille, leurs vêtements et leur bassine d'eau en plastique. «Ils sont venus, ils ont pointé une arme vers moi et ils ont dit «réveille-toi, réveille-toi, donne-nous ton argent et tout ce que tu as», a-t-il raconté, assis devant son cabane de bois et regardant tristement l'amoncellement de tentes de plastique blanc devant ce qui était autrefois sa cour.

Patrice Sebahunde et plusieurs autres témoins ont rapporté que les soldats avaient tiré en l'air et qu'une femme de 45 ans avait été tuée sur le coup. Une jeune femme de 20 ans avait été tuée jeudi soir à Kibati par des soldats qui avaient aussi tiré en l'air. La balle avait transpercée la toile de sa tente et l'avait atteinte à la tête.

Les responsables des Nations unies chargés des réfugiés qui avaient signalé la fusillade de jeudi disaient ne pas disposer d'informations sur les violences présumées de dimanche. «Des tirs peuvent être facilement dissimulés», a expliqué David Nthegwe, ajoutant qu'une fillette de deux ans avait succombé à la maladie, probablement au paludisme, dimanche soir dans le camp. «Selon nos informations sur le terrain hier soir il n'y a pas eu de pillage, ni de tués.»

Toutefois au moins dix personnes dont les témoignages ont été recueillis séparément par l'Associated Press ont rapporté les mêmes faits. Le pillage raconté dimanche a suivi une confrontation dans l'après-midi entre les soldats et les casques bleus de l'ONU à l'extérieur du camp.

Les soldats ont arrêté un convoi de la MONUC, la mission des Nations unies au Congo, à un barrage routier improvisé et ont sorti 23 Congolais des camions, les accusant d'être des rebelles. Les responsables de l'ONU ont expliqué qu'il s'agissait de combattants rebelles qui s'étaient rendus mais aussi de policiers et de civils. Lors de l'incident, des pierres ont été jetées sur les véhicules des casques bleus par une foule de personnes en colère accusant l'ONU de ne pas les avoir protégés. L'un des casques bleus a été blessé, selon un porte-parole de la MONUC, le lieutenant-colonel Jean-Paul Dietrich.