La rébellion congolaise de Laurent Nkunda a infligé jeudi un revers majeur à l'armée en s'emparant d'au moins une nouvelle localité de l'est de la RDC, à la veille d'un sommet international sur la crise dans la région, dont elle affirme par avance qu'il ne résoudra rien.

Les combattants du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) ont pris le contrôle de Nyanzale, à 80 km au nord-ouest de Goma (capitale de la province du Nord-Kivu) qui abritait l'état-major de la 15e brigade de l'armée loyaliste.

Ils se seraient également emparés de la localité voisine de Kikuku, à 9 km plus au nord, où «des blindés» de la Mission des Nations unies en République démocratique du Congo (Monuc) «ont été envoyés (...) avec pour mission d'arrêter leur offensive», selon un porte-parole militaire de la Monuc à Kinshasa, le lieutenant-colonel Jean-Paul Dietrich.

Au cours d'un entretien par téléphone avec l'AFP, le porte-parole du CNDP, Bertrand Bisimwa, a réaffirmé la volonté de son mouvement de discuter seul à seul avec Kinshasa, ce que le nouveau gouvernement d'Adolphe Muzito a jusqu'à présent toujours refusé.

«Notre intention n'est pas de prendre des territoires, mais de dire au gouvernement qu'il faut négocier», a-t-il déclaré.

Le porte-parole a rejeté sur Kinshasa la responsabilité des combats de ces deux derniers jours dans la zone de Nyanzale, assurant que l'armée congolaise et les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR, rebelles hutus rwandais) les avaient attaqués mercredi.

«Nous avons été obligés de riposter et nous les avons fait déguerpir», a-t-il ajouté, espérant que le CNDP serait «pris aux sérieux» par le gouvernement.

Après la prise de Rutshuru (75 km au nord de Goma) et l'arrivée de la rébellion à proximité de Goma la semaine dernière, cette nouvelle avancée du CNDP sur le front nord-ouest des territoires sous son contrôle renforce encore un peu plus son emprise sur le Nord-Kivu.

La chute de Nyanzale et celle probable de Kikuku lui ouvrent en particulier un important axe de pénétration vers la ville de Kanyabayonga (120 km au nord de Goma), agglomération qui verrouille toute la partie nord de la province du Nord-Kivu.

Sur le front est des territoires rebelles, les hommes de Laurent Nkunda contrôlaient jeudi la petite ville de Kiwanja (80 km au nord de Goma), après deux jours de combats avec des miliciens pro-gouvernementaux Maï-Maï.

Huit cadavres d'hommes en civils ont été comptabilisés par un photographe de l'AFP. Le CNDP s'était emparé de ce petit centre commercial la semaine dernière, lors de l'offensive qui l'a conduit aux portes de Goma, ville d'un demi-million d'habitants.

En sueur et visiblement épuisés, près de 150 rebelles se déplaçaient à pied jeudi dans Kiwanja, déclarant avoir «sécurisé» le front à l'ouest de la localité. «Les Maï-Maï sont partis», a affirmé un commandant rebelle sur place, le major Etienne.

Sur le plan diplomatique, le sommet de Nairobi, voulu par la communauté internationale et qui doit permettre de mettre fin à cette énième crise dans le Kivu, réunira vendredi le président congolais Joseph Kabila, son homologue du Rwanda Paul Kagame, et le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon.

Les présidents de l'Union africaine, du Kenya, d'Ouganda, de Tanzanie, du Burundi et d'Afrique du Sud y participeront également.

Pour le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende, «l'unique enjeu du sommet de Nairobi, c'est de mettre fin aux incompréhensions qui ont caractérisé au cours de ces dernières années les relations» avec le Rwanda.

La RDC accuse son voisin de soutenir la rébellion de Laurent Nkunda, ce que nie catégoriquement le Rwanda.

Mais le CNDP a rejeté par avance jeudi les conclusions du sommet. «Nous n'attendons rien de cette réunion, il ne va rien en sortir, il y a déjà eu beaucoup de conférences du même genre», a déclaré Bertrand Bisimwa. «Nous voulons une rencontre entre Congolais».

En attendant, la situation humanitaire reste des plus précaires. Les derniers affrontements à Kiwanja ont provoqué le déplacement de milliers de civils vers Rutshuru, cinq km plus au sud. Les combats au Nord-Kivu depuis deux mois ont déjà poussé quelque 250.000 personnes sur les routes.

Par ailleurs, un journaliste belge germanophone travaillant pour le quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) a été enlevé mardi à Kiwanja, a-t-on appris jeudi de sources concordantes.

Ce journaliste, Thomas Scheen, «a été enlevé par un groupe de la mouvance Maï-Maï», selon le ministère des Affaires étrangères à Bruxelles, qui a confirmé une information du journal belge Le Soir.

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