Des dirigeants d'Afrique australe ont entamé lundi au Swaziland un sommet sur la crise zimbabwéenne en l'absence du chef de l'opposition Morgan Tsvangirai, qui a décidé de boycotter la réunion après avoir rencontré des difficultés à obtenir ses documents de voyage.

Le président Robert Mugabe, 84 ans dont 28 au pouvoir, était lui présent à Mbabane à l'ouverture des débats, organisés par l'organe de politique, défense et sécurité de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC).Cette rencontre visait initialement à faciliter les négociations entre MM. Mugabe et Tsvangirai, qui ne parviennent pas à s'entendre sur la composition d'un gouvernement d'union, cinq semaines après avoir signé un accord historique de partage du pouvoir.

Mais le chef du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), privé de passeport depuis des mois, n'a reçu un document de voyage temporaire que dimanche en fin d'après-midi, ce qui l'a empêché d'obtenir le nécessaire visa de transit par l'Afrique du Sud.

«C'est une insulte», s'est emporté lundi Tendai Biti, secrétaire général du MDC, lors d'une conférence de presse à Johannesburg, en précisant que même si M. Tsvangirai obtenait ce visa, il ne se rendrait plus au Swaziland.

«Ca suffit! Nous ne voyagerons plus avec ça», a-t-il déclaré, en agitant la copie du document de voyage issu en urgence pour M. Tsvangirai. «Nous avons atteint la limite de notre élasticité.»

«Nous voulons un sommet extraordinaire de la SADC, non seulement pour nous pencher sur les problèmes non résolus, mais aussi pour dire au président Mugabe que trop c'est trop», a-t-il ajouté.

Selon lui, les tracas administratifs de M. Tsvangirai prouvent que le régime Mugabe n'est «pas prêt» à partager équitablement le pouvoir.

La crise politique au Zimbabwe est née de la défaite historique du régime lors des élections générales de mars.

MM. Mugabe et Tsvangirai ont signé le 15 septembre un accord prévoyant que le premier reste le chef de l'Etat et que le second devienne premier ministre, mais ils n'ont jamais réussi à s'entendre que la composition de leur gouvernement d'union.

Le président Mugabe a fini par attribuer unilatéralement, début octobre, les principaux portefeuilles ministériels (Défense, Intérieur, Affaires étrangères, Information...) à son parti, ce qui a provoqué la colère du MDC.

Pour tenter de sauver le pacte, le médiateur sud-africain Thabo Mbeki a supervisé la semaine dernière quatre jours de négociations à Harare, qui se sont conclus par un échec.

Les rivaux s'étaient toutefois mis d'accord pour renvoyer la question à l'organe spécialisé sur les questions politiques de la SADC, «la troïka», actuellement présidée par le roi Mswati III du Swaziland, assisté du Mozambique et de l'Angola.

Lundi, cet organe a débuté ces travaux sans M. Tsvangirai. La réunion a ouvert peu après 12h30 (6h30 HAE) dans un hôtel de la capitale swazie Mbabane en présence du roi, du président mozambicain Armando Guebuza et du ministre des Affaires étrangères angolais, Assuncao dos Anjos.

Le chef de l'Etat sud-africain Kgalema Motlanthe, qui préside actuellement la SADC, assistait également à la rencontre, au cours de laquelle son prédécesseur Thabo Mbeki doit dresser le compte-rendu des pourparlers de la semaine dernière.

Aucun des dirigeants n'a souhaité s'exprimer, mais le leader d'une petite faction dissidente du MDC a estimé que les discussions n'auraient aucune valeur en l'absence de M. Tsvangirai. «Il ne peut y avoir de troïka sans Tsvangirai», a estimé Arthur Mutambara, également signataire de l'accord du 15 septembre.

Pendant ce temps, la situation économique continue de se dégrader au Zimbabwe, où l'inflation dépasse les 231 millions %, le chômage les 80% et où l'espérance de vie a chuté à 36 ans.