Le principal groupe armé du sud pétrolier du Nigeria a annoncé jeudi soir avoir détruit un oléoduc de la compagnie anglo-néerlandaise Shell, cible pour la cinquième fois en moins d'une semaine de la «guerre du pétrole» lancée par ses militants.

Dans un courriel de revendication envoyé aux médias, le Mouvement pour l'émancipation du delta du Niger (Mend) a déclaré avoir «détruit avec de puissants explosifs un important oléoduc appartenant à Shell Development Company».

L'attaque s'est déroulée dans l'État de Rivers (sud), près d'Elem-Kalabari et du canal Cawthorne, selon le groupe armé.

Interrogée par l'AFP, Shell n'était pas en mesure de confirmer vendredi les faits.

«Nous avons également eu cette information (...) Nous devons aller sur place pour vérifier», a déclaré Precious Okolobo, porte-parole de la compagnie.

L'attaque de jeudi soir est la cinquième que le Mend affirme avoir menée contre Shell depuis dimanche, lorsque les militants ont annoncé le lancement d'une «guerre du pétrole» sous le nom de code «Ouragan Barbarossa».

Au cours de la seule journée de mercredi, les militants ont affirmé avoir «fait exploser un important tronçon d'un oléoduc qui semble appartenir aux compagnies Shell et Agip», à Rumuekpe, dans l'État de Rivers et avoir détruit mardi soir la station de pompage d'Orubiri, également dans l'État de Rivers.

Shell a confirmé en début de semaine la première attaque qui visait sa station de pompage d'Alakiri, près des côtes de l'État de Rivers, puis une deuxième contre son oléoduc à Bakana, également dans l'État de Rivers.

Mais la société n'a confirmé aucune des trois attaques suivantes revendiquées par le Mend.

Le groupe armé a par ailleurs annoncé dans la nuit de jeudi à vendredi avoir relâché deux otages sud-africains qu'il affirmait avoir placés «sous sa garde» après les avoir libérés de mains de pirates qui les auraient initialement enlevés.

L'ambassadeur d'Afrique du Sud au Nigeria, Stix Sifingo, a confirmé à l'AFP qu'ils avaient été relâchés et qu'ils se portaient bien.

Shell a évacué par précaution en début de semaine plusieurs dizaines d'employés de certains sites, plus d'une centaine selon une source du secteur pétrolier.

Le groupe français Total a lui affirmé vendredi qu'il n'avait pas rapatrié de salariés du Nigeria.

Des installations de la compagnie pétrolière américaine Chevron ont aussi été la cible de deux attaques depuis une semaine, dans l'État de Rivers.

Chevron a annoncé vendredi avoir vendu sa filiale nigériane de commercialisation de carburants, Chevron Nigeria Holdings, à une société de Panama.

En annonçant le lancement de la «guerre du pétrole», le Mend avait menacé tous les pétroliers et méthaniers qui s'approcheront du delta du Niger, la zone d'où le Nigeria tire 90% de ses devises.

Le groupe armé menace aussi de s'en prendre au site offshore Agbami de Chevron et, comme en juin dernier, à une autre importante unité de production offshore de Shell, le FPSO Bonga.

Apparu début 2006, le Mend affirme se battre pour les populations locales et un meilleur partage des richesses pétrolières. Il a multiplié attaques, enlèvements d'expatriés et sabotages.

Ces violences ont fait perdre au pays environ un quart de sa production quotidienne d'or noir. Le Nigeria perd aussi quelque 80.000 barils de pétrole par jour rien que dans le trafic illégal, souvent organisé par des hommes politiques influents.

Actuellement, la production oscille entre 1,8 et 2 millions de barils par jour, contre 2,6 mbj il y a deux ans.

Face à la recrudescence de la violence ces derniers jours, les autorités nigérianes sont restées discrètes. La semaine dernière, elles avaient annoncé la création d'un ministère spécifique chargé du développement et de la pacification du delta du Niger, une région vitale pour le pays.