(Singapour) Le dialogue entre les États-Unis et la Chine est « essentiel » et permettra d’éviter les erreurs d’appréciation qui pourraient conduire à un conflit, a déclaré samedi le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin.

M. Austin s’exprimait à Singapour lors de la conférence Shangri-La de dialogue sur la défense, après que Pékin a décliné une invitation à une rencontre formelle entre lui et son homologue chinois Li Shangfu. Les deux ministres se sont toutefois serrés la main et se sont parlés pour la première fois lors du dîner d’ouverture de cette conférence.

« Les États-Unis estiment que des lignes de communication ouvertes avec la République populaire de Chine sont essentielles, en particulier entre nos responsables militaires et de la défense », a souligné M. Austin dans une allocution.

« Plus nous parlerons, plus nous pourrons éviter les malentendus et les erreurs d’appréciation qui pourraient déboucher sur une crise ou un conflit », a-t-il ajouté.

Les États-Unis avaient invité M. Li à rencontrer M. Austin en marge de la conférence. Mais Pékin a refusé, une porte-parole officiel affirmant que « les États-Unis savent clairement pourquoi il y a actuellement des difficultés dans la communication militaire » entre les deux pays.

Li Shangfu, devenu ministre de la Défense en mars dernier, avait été sanctionné par le gouvernement américain en 2018 pour avoir acheté des armes russes. Mais le Pentagone affirme que cela n’empêche pas M. Austin de dialoguer officiellement avec lui.

« Une poignée de main cordiale au cours d’un dîner ne remplace pas un engagement substantiel », a regretté le ministre américain lors de la conférence.

« Cesser de provoquer »

Le colonel de l’armée chinoise Zhao Xiaozhuo a également déclaré au cours du forum que des lignes de communication entre les deux pays sont essentielles, tout en appelant les États-Unis « à cesser de provoquer la sécurité de la Chine ».

Lloyd Austin effectue actuellement une tournée en Asie qui l’a déjà conduit au Japon et qui comprendra également une visite en Inde. Ce voyage s’inscrit dans le cadre des efforts déployés par Washington pour renforcer ses alliances et partenariats dans la région face à la montée en puissance de la Chine

En outre, M. Austin s’est dit « profondément préoccupé par le fait que (la Chine) n’ait pas souhaité s’engager plus sérieusement dans l’amélioration des mécanismes de gestion de crises entre nos deux armées », ajoutant espérer que Pékin change d’avis.  

Il a également reproché à la Chine de procéder à « un nombre alarmant d’interceptions risquées d’appareils américains et alliés volant en toute légalité dans l’espace aérien international », faisant notamment écho à un récent incident survenu en mer de Chine méridionale entre un avion de chasse chinois et un appareil américain.  

Préserver le statu quo

Un pilote d’avion de combat chinois a effectué la semaine dernière « une manœuvre agressive injustifiée » près d’un appareil de reconnaissance américain qui survolait la mer de Chine méridionale, selon des militaires américains.  

Des images vidéo diffusées le 30 mai par l’armée américaine ont montré l’avion chinois passer devant un appareil américain, que l’on aperçoit secoué par les turbulences consécutives à ce passage.

Du point de vue d’un porte-parole militaire chinois, l’avion américain a « délibérément fait irruption » dans une zone d’entraînement de la Chine « pour effectuer (des opérations) de reconnaissance ».

Les tensions sont à leur comble entre Pékin et Washington, en particulier à propos de Taïwan et à la suite du survol par un ballon chinois du territoire américain en début d’année.

Depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949, la Chine considère Taïwan comme une province qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire, et Pékin vise cette réunification par la force si nécessaire.

Alors que les relations entre Pékin et Taipei se sont encore dégradées ces dernières années, la Chine a multiplié les incursions militaires autour de l’île.

En avril, l’armée chinoise a organisé de grandes manœuvres militaires qui ont simulé pendant trois jours un encerclement de l’île, menées en représailles à des escales quelques jours plus tôt de la présidente taïwanaise aux États-Unis.