Sécheresses, canicules, pénuries : l’année 2022 a été dure pour l’agriculture dans de nombreuses régions du monde. Le réchauffement climatique incite des chercheurs et des fermiers à se tourner vers des cultures plus adaptées à la nouvelle réalité.

Sorgho

PHOTO ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Culture de sorgho à Bijie, dans le sud-ouest de la Chine

Lorsqu’elle était enfant, Bonnetta Adeeb trouvait toujours du sirop de sorgho à la maison, dans le sud-est des États-Unis. Un peu comme le sirop d’érable dans les armoires de ce côté-ci de la frontière, explique-t-elle. « Mais il y a tellement d’autres usages, dit au téléphone la fondatrice de l’organisme Ujamaa Cooperative Farming Alliance. Ça peut être utilisé pour faire du lait, comme l’avoine, pour du pain, des céréales, comme du riz… Les feuilles peuvent aussi être utilisées. »

  • Transformation de sorgho en sirop lors d’un festival, le 5 septembre dernier, près de Waco au Texas

    PHOTO ROD AYDELOTTE, ASSOCIATED PRESS

    Transformation de sorgho en sirop lors d’un festival, le 5 septembre dernier, près de Waco au Texas

  • Transformation de sorgho en sirop lors d’un festival, le 5 septembre dernier, près de Waco au Texas

    PHOTO ROD AYDELOTTE, ASSOCIATED PRESS

    Transformation de sorgho en sirop lors d’un festival, le 5 septembre dernier, près de Waco au Texas

  • Récolte de sorgho au Texas

    PHOTO ROD AYDELOTTE, ASSOCIATED PRESS

    Récolte de sorgho au Texas

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L’enseignante retraitée voulait aider les agriculteurs comme les jardiniers de communautés noires, autochtones et de couleur à connaître les semences traditionnelles. Bonnetta Adeeb est particulièrement fière de transmettre ses connaissances sur le sorgho, une céréale nutritive originaire d’Afrique, facile à faire pousser, mais qui reste méconnue. « Le sorgho est cultivé un peu partout dans le monde, ajoute-t-elle. Il est adapté au climat. Il pousse bien dans un sol pauvre, il requiert le sixième de l’eau [d’autres cultures populaires]. Si ce n’était du sorgho, les gens en Afrique de l’Est auraient de la difficulté et auraient faim. »

PHOTO EDUARDO SOTERAS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Des femmes tamisent des grains de sorgho dans un village d’Éthiopie.

Cette graminée a attiré l’attention des médias français pendant les canicules, alors que des agriculteurs de sorgho s’en tiraient mieux que d’autres cultivateurs.

PHOTO SARAH MEYSSONNIER, ARCHIVES REUTERS

Un agriculteur français dans son champ de sorgho près de Saint-Escobille, en août dernier

Amarante

PHOTO PRAKASH MATHEMA, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Culture d’amarante en périphérie de Katmandou, au Népal

Le lendemain de l’Halloween, au jour des Morts, les Mexicains avaient l’habitude de façonner des têtes de mort avec des grains d’amarante, une pseudocéréale aux propriétés nutritives comparables à celles du quinoa. Ils la mélangeaient avec du miel pour en faire une friandise, dans la tradition aztèque.

« C’est le cadeau du Mexique au reste du monde, qui n’est pas tout à fait réalisé », dit le professeur à l’Université d’État du Tennessee Matthew Blair. Fasciné par les propriétés de la plante, il est le président de l’Amaranth Institute, qui vise à faire connaître cette pseudocéréale.

  • Micropousses d’amarante rouge

    PHOTO FOURNIE PAR LES FERMES LUFA

    Micropousses d’amarante rouge

  • Grains d’amarante

    PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

    Grains d’amarante

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Il ne tarit pas d’éloges pour ce grain qui, s’il est originaire du Mexique et de l’Amérique du Sud, a commencé à se répandre un peu partout en raison de sa résistance au climat sec, dans un sol chargé de sel et peu humide. Comme ce grain, plus petit que le quinoa, est récolté à l’automne, il permet aux producteurs qui auraient plus d’une culture de bénéficier d’une plus longue saison. « En plus de la question de la sécurité alimentaire, je pense que c’est important de penser à l’industrie alimentaire, ajoute-t-il. Même un petit commerce familial peut y trouver son compte. » L’amarante est utilisée dans des céréales à déjeuner, des friandises, des barres nutritives.

Millet perlé

PHOTO GETTY IMAGES

Culture de millet en Inde

De l’Afrique de l’Ouest à l’Asie, en passant par le Texas, le millet perlé est cultivé dans plusieurs régions du monde. On en trouve même… au Québec. « C’est très marginal, sinon expérimental », précise l’agronome consultant Pierre Bélanger. Le défi ici est de trouver comment l’adapter au froid – et d’empêcher les oiseaux de se régaler dans les champs, puisqu’ils sont très friands du grain, qui n’est pas protégé par des feuilles.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Grains de millet

Mais pour les pays touchés par les canicules et les sécheresses, le millet perlé est plutôt salvateur. Il permet de « rétablir le bilan humique » du sol, ce qui le rend intéressant dans les cultures de rotation, dit M. Bélanger. « La culture de pomme de terre, par exemple, c’est une culture qui est exigeante pour le sol, ça réduit énormément la quantité de matière organique dans le sol, explique-t-il. Donc la culture de millet fourrager permet de rétablir le bilan humide du sol. » En Afrique de l’Ouest, lorsque le sol est trop dénutri pour permettre au maïs de pousser, les cultivateurs se tournent vers le millet perlé, dit-il. La graminée peut être utilisée pour sa farine ou dans un porridge, par exemple.

Fonio et riz africain

PHOTO TIRÉE DE WIKIMEDIA COMMONS

Culture de fonio au Sénégal

Le fonio est considéré comme la céréale cultivée depuis le plus longtemps sur le continent africain, soit depuis des milliers d’années. Il ressemble un peu au millet ou à du quinoa blanc. On le retrouve particulièrement dans les cuisines de l’Afrique de l’Ouest. Il résiste bien à la chaleur et à l’absence d’eau et il atteint sa maturité rapidement, en plus d’avoir des propriétés nutritionnelles intéressantes.

Le chef sénégalais Pierre Thiam, installé aux États-Unis, a contribué à faire connaître la céréale dans son pays d’accueil. Le fonio s’utilise un peu comme du riz ou du couscous. « Nous sommes en contact avec des cultivateurs en Afrique de l’Ouest qui font pousser du fonio et du millet, dit Mme Adeeb. Mais une autre plante nous intéresse : le riz africain. Nous avons des variétés de riz africain en Louisiane et en Géorgie. » Ce type de riz requiert moins d’eau que le grain traditionnel cultivé en Asie, souligne-t-elle, ce qui en fait un choix intéressant pour des milieux plus secs.

Avec The Guardian

Rectificatif
Une version précédente indiquait que le millet perlé permettait de rétablir le bilan humide du sol. Il aurait plutôt fallu lire bilan humique. Nos excuses.