(Glasgow) Après les chefs d’État, place aux financiers et aux négociateurs, qui à la COP26 de Glasgow ont commencé à discuter âprement mercredi des financements et moyens nécessaires pour lutter contre le réchauffement planétaire, sous le regard critique des militants du climat.

Avec dans le viseur un réchauffement de la planète limité à +1,5 °C et l’idée que chaque dixième de degré compte, les pays sont sous pression pour en faire davantage, freiner le changement du climat et protéger les populations contre les catastrophes déjà en cours.  

Le financement est le nerf de la guerre dans cette équation, et les pays en développement, frappés de plein fouet par un dérèglement dont ils ne sont que marginalement responsables, demandent que soit enfin tenue la promesse vieille d’une décennie d’un financement de 100 milliards de dollars par an de la part des pays développés.

Le chancelier de l’échiquier du Royaume-Uni, pays hôte de cette conférence prévue jusqu’au 12 novembre, Rishi Sunak, a assuré mercredi que ce serait chose faite grâce à la COP26.

« Nous savons que vous avez été dévastés par la double catastrophe de la COVID-19 et du changement climatique », a-t-il dit. « C’est pourquoi nous allons satisfaire l’objectif de 100 milliards de dollars de finance climat aux pays en développement ».

Patricia Espinosa, la secrétaire exécutive de la convention Climat de l’ONU, a dit espérer « qu’à la fin de cette conférence nous arriverons à l’objectif des 100 milliards en 2022 », au vu des annonces faites par les pays, Japon, USA, Grande-Bretagne… depuis dimanche.

Accusations d’écoblanchiment

Côté secteur privé, on promet la neutralité carbone. Plusieurs centaines d’acteurs financiers (banques, assurances, gestionnaires d’actifs…) sont désormais engagés à atteindre cet équilibre entre émissions et absorption de carbone en milieu de siècle, a annoncé le Canadien Mark Carney, qui pilote cette alliance mise en place sous la houlette de l’ONU.

PHOTO DANIEL LEAL-OLIVAS, AGENCE FRANCE-PRESSE

Mark Carney.

Lancée il y a quelques mois, la « Glasgow Financial Alliance for Net Zero » (GFanz) réunit à présent 450 acteurs financiers de 45 pays représentant quelque 130 000 milliards de dollars d’actifs, selon l’ancien gouverneur de la banque d’Angleterre.

Ces institutions s’engagent à la neutralité carbone d’ici 2050 « au plus tard », à « faire leur juste part dans une réduction des émissions de moitié au cours de cette décennie », et à réviser leurs objectifs tous les cinq ans.

Mais cette Alliance laisse sur leur faim les organisations non gouvernementales, qui soulignent qu’elle n’empêche pas les investissements dans le charbon ou le pétrole.

Plusieurs ONG ont aussi dénoncé mercredi les restrictions d’accès imposées par les organisateurs de la COP26, où des milliers d’experts ne peuvent pas assister aux négociations alors que les règles de la Convention des Nations Unies sur les changements climatiques les y autorise, pour permettre une transparence du processus. L’ONU invoque la COVID-19.

Simultanément, à l’extérieur du centre de conférences, plusieurs centaines de défenseurs de l’environnement accusaient la COP26 de « greenwashing ». La police écossaise a indiqué avoir procédé à deux arrestations après que des agents ont été aspergés de peinture.

Après deux journées de sommet des chefs d’État et de gouvernement, une centaine de pays se sont engagés mardi à réduire drastiquement leurs émissions d’un gaz à effet de serre moins connu que le CO2 mais beaucoup plus puissant : le méthane (CH4).

Dissensions entre Pékin et Washington

Ces pays, qui représentent plus de 40 % des émissions de méthane dues aux activités humaines (élevage, industrie pétrolière et gazière, production de déchets), visent une baisse d’au moins 30 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2020.

Signe de la difficulté de parvenir à des actions communes dans la lutte contre le changement climatique, de gros pollueurs comme la Chine, la Russie et l’Inde manquaient toutefois à l’appel. L’absence du géant économique chinois n’a pas manqué de faire des étincelles entre Washington et Pékin.

Peu avant de quitter Glasgow mardi soir, le président américain Joe Biden s’en est vivement pris à son homologue chinois Xi Jinping, estimant qu’il avait commis « une grave erreur » en ne venant pas en Écosse et que la Chine ne pouvait « prétendre à un quelconque leadership » en « tournant le dos » à la crise climatique.

A Pékin, le porte parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin, a qualifié ces propos de « creux ».

Les pays en développement et émergents, dont la Chine, font face à des « problèmes pratiques » pour atteindre ces « objectifs ambitieux », a fait valoir M. Wang, arguant notamment d’un « manque de technologies » adaptées.

Moins d’émissions d’un côté, plus d’absorption naturelle de l’autre : près de cent pays abritant 85 % des forêts mondiales, dont la Chine, s’étaient par ailleurs engagés mardi à enrayer la déforestation pour protéger ces poumons de la planète qui absorbent une grande partie du CO2.