(Nations unies) Le Conseil de sécurité de l’ONU a tenu mardi sa première réunion publique formelle sur la cybersécurité, Washington réclamant un respect du cadre déjà approuvé aux Nations unies tandis que Moscou plaidait en faveur d’un traité.

« Le risque est clair » et « la coopération est essentielle » pour lutter contre les activités malveillantes, a souligné l’ambassadrice américaine à l’ONU, Linda Thomas-Greenfield. « Nous avons un cadre, il est temps de l’appliquer », a-t-elle déclaré sans évoquer la Russie, souvent accusée par les Occidentaux de piratage informatique.

À l’ONU, au sein de la première commission traitant du désarmement, « nous nous sommes déjà mis d’accord en 2015 pour nous abstenir de toute cyberactivité malveillante contre les infrastructures critiques de chaque État membre de l’ONU », précise un ambassadeur européen sous couvert de l’anonymat.

Lors d’un récent sommet à Genève, le président américain Joe Biden a rappelé à son homologue russe Vladimir Poutine qu’il y avait des domaines « intouchables », dressant une liste de 16 secteurs de l’énergie à la distribution d’eau.

Vantant un rôle proactif de la Russie dans la lutte contre la cybercriminalité, l’ambassadeur russe à l’ONU Vassily Nebenzia a souhaité de son côté l’adoption de « nouvelles normes », via « un projet de convention d’ici 2023 », juridiquement contraignante.

« Si les menaces de la sécurité informatique mondiale font que nous sommes tous égaux, alors il faut en débattre non pas au sein d’un cercle étroit des États technologiquement développés, mais avec tous les États de l’ONU », a insisté le diplomate russe.

Réduire sur l’internet la liberté d’expression

À double usage, civil et militaire, le cyberespace « n’est pas un sujet habituel pouvant s’inscrire dans le domaine du contrôle des armements. Vous ne pouvez pas signer un traité et ensuite simplement vérifier. Vous devez avoir une approche plus innovante », estime toutefois le même ambassadeur européen.

Les Occidentaux soupçonnent la Russie, soutenue par la Chine, de vouloir un traité afin de réduire sur l’internet la liberté d’expression, et donc les oppositions.

« L’Estonie est convaincue que le droit international existant, y compris la Charte des Nations unies dans son intégralité, le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’Homme s’appliquent dans le cyberespace », a déclaré sa première ministre, Kaja Kallas, à l’origine de la réunion du Conseil.

« Far-west numérique »

Au nom de la France, le ministre délégué au Commerce extérieur Franck Riester a proposé un « programme d’action » pour mettre en œuvre les normes agréées. « Nous ne voulons pas d’un far-west numérique ni d’un cloisonnement du cyberespace », a-t-il dit.

Plusieurs membres du Conseil de sécurité ont reconnu les graves dangers de la cybercriminalité, notamment les attaques au rançongiciel, un programme qui crypte les systèmes informatiques et exige une rançon pour les débloquer.  

Dans le passé, le Conseil avait déjà abordé le sujet de la cybercriminalité, mais de manière informelle.

En ouvrant le débat, Izumi Nakamitsu, secrétaire générale adjointe de l’ONU pour le Désarmement, a souligné que l’Organisation avait noté « une augmentation spectaculaire du nombre d’incidents malveillants ces dernières années », de la désinformation à la perturbation des réseaux informatiques.

« Ils contribuent à une baisse de la confiance entre États », a-t-elle déploré. Elle a précisé qu’en janvier, 4,6 milliards d’individus dans le monde étaient des utilisateurs actifs de l’internet. D’ici 2022, 28,5 milliards d’appareils seront connectés à internet, soit une hausse considérable par rapport aux 18 milliards recensés en 2017, a-t-elle ajouté.