(Kiev) L’Ukraine a accusé jeudi la Russie de chercher à la « détruire », à la veille d’un sommet trilatéral avec la France et l’Allemagne sur le récent regain de tensions dans la région, Moscou ayant massé des troupes aux frontières ukrainiennes.

Depuis plusieurs semaines, les heurts se sont multipliés entre Kiev et les séparatistes prorusses du Donbass (est de l’Ukraine), tandis que des dizaines de milliers de soldats russes ont été déployés à proximité, laissant craindre une opération militaire d’ampleur.  

Les Occidentaux ont mis en garde la Russie contre ces démonstrations de force et le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, va rencontrer vendredi à Paris son homologue français, Emmanuel Macron.  

La chancelière allemande Angela Merkel participera aux discussions par visioconférence, selon la présidence française.

Les tensions avec Moscou ont été au cœur d’une réunion du Conseil de sécurité national jeudi, a indiqué dans la soirée le président Zelensky. « La situation dans le Donbass est contrôlée » et « l’armée est prête » à tout, a-t-il assuré.

Le gouvernement ukrainien craint que Moscou ne cherche à provoquer un casus belli pour tenter de justifier une opération armée.  Le Kremlin a de son côté assuré « ne menacer personne » et dénoncé en retour des « provocations » de Kiev.

Dans ce contexte, le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, a estimé jeudi que la Russie faisait peser sur l’Ukraine une menace existentielle.

Les responsables russes « menacent ouvertement l’Ukraine d’une guerre et de détruire l’État ukrainien », a-t-il déclaré au cours d’une conférence de presse avec ses trois homologues des pays baltes, allés à Kiev pour exprimer leur solidarité.  

Pour décourager la Russie d’attaquer, « il faut lui faire comprendre que les conséquences de ses aventures militaires seront très douloureuses », a-t-il ajouté, soutenant que la « ligne rouge » pour l’Ukraine serait une violation de sa frontière.  

Moscou dément toute menace

« Nous savons bien qui est responsable, qui savons qui fait monter la tension. C’est la Fédération de Russie », a renchéri le chef de la diplomatie lituanienne, Gabrielius Landsbergis, aux côtés de M. Kouleba.  

La Russie a déployé ces dernières semaines des dizaines de milliers de soldats à la frontière avec l’Ukraine et en Crimée, une péninsule qu’elle a annexée en 2014. Elle a affirmé y procéder à des manœuvres militaires en réponse aux actes « menaçants » de l’OTAN, une alliance à laquelle l’Ukraine ambitionne de s’intégrer.

Parallèlement, les violences ont repris depuis le début de l’année dans le conflit avec les séparatistes prorusses, dont le Kremlin est considéré comme le principal parrain militaire, malgré ses dénégations.  

Selon Kiev, 28 soldats des forces gouvernementales ont été tués sur le front depuis le début de l’année contre 50 en tout en 2020. Les rebelles ont, quant à eux, fait état d’au moins vingt morts dans leurs rangs depuis janvier.  

Moscou accuse pour sa part Kiev de préparer une offensive contre les séparatistes, prévenant qu’elle irait les secourir en cas d’attaque après avoir distribué dans cette zone des centaines de milliers de passeports russes.

La porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova a de son côté appelé jeudi Berlin et Paris à « arrêter de participer à la campagne de propagande autour des mouvements de troupes russes qui ne menacent personne » et à « inciter Kiev à la désescalade ».  

Aux yeux des Occidentaux, c’est Moscou qui doit faire baisser la tension.  

Le président américain Joe Biden et la chancelière Merkel ont demandé à la Russie de « réduire » les effectifs de ses troupes autour de l’Ukraine.  Le même jour, Berlin a accusé la Russie de « provocation ».  

« Nous allons tout entreprendre pour que les choses ne dégénèrent pas », a ajouté la ministre allemande de la Défense Annegret Kramp-Karrenbauer, saluant Kiev pour sa réaction « mesurée ».

La guerre dans le Donbass a commencé en avril 2014, dans la foulée d’une révolution pro-occidentale en Ukraine qui avait aussi été suivie de l’annexion par Moscou de la Crimée, sous le regard impuissant des Occidentaux.  

Selon l’ONU, ce conflit a fait plus de 13 000 morts et près de 1,5 million de personnes déplacées.