Les appels à la désescalade se multipliaient, lundi, pendant que Donald Trump alimentait son fil Twitter de publications telles que « L’Iran n’aura jamais d’arme nucléaire », que la confusion régnait concernant la présence des troupes américaines en Irak et que les Iraniens appelaient à la vengeance en rendant hommage à Qassem Soleimani. Résumé en cinq temps d’une autre journée mouvementée.

Une lettre envoyée par « erreur »

En après-midi, Bagdad a annoncé que l’armée américaine avait signifié dans une lettre le retrait de ses troupes du territoire irakien. « Nous respectons votre décision souveraine qui ordonne notre départ », indiquait notamment la lettre, écrite par le général William Seely, commandant des opérations militaires américaines en Irak, en référence à la motion du Parlement irakien adoptée dimanche. La missive était réelle, mais elle n’aurait jamais dû être envoyée. Du moins, pas lundi, selon le chef d’état-major américain, qui a rapidement réagi en précisant que la lettre était authentique, mais qu’elle avait été envoyée par erreur. « C’était un projet [de lettre] non signé », envoyé à quelques leaders militaires irakiens parce que les mouvements de troupes américaines en Irak se sont accrus au cours des derniers jours, a expliqué à la presse le général Milley. « Aucune décision n’a été prise de quitter l’Irak. Point. Cette lettre ne correspond pas à notre état d’esprit aujourd’hui », a secondé le secrétaire américain à la Défense, Mark Esper. Ce dernier a précisé que les troupes étaient redéployées en Irak, mais qu’elles ne quittaient pas le pays. Lors d’une séance extraordinaire en présence du premier ministre démissionnaire Adel Abdel Mahdi, le Parlement irakien a demandé dimanche au gouvernement de « mettre fin à la présence des troupes étrangères » en Irak. Mais la motion du Parlement, adoptée à main levée par les 168 députés présents (sur 329), n’est pas contraignante et le gouvernement irakien n’y a pour le moment pas donné suite.

Appel à la désescalade

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a demandé à l’Iran d’éviter « davantage de violences et de provocations », à sa sortie d’une réunion extraordinaire de l’organisation tenue à Bruxelles, lundi. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a appelé à suivre « la voie de la pondération ». Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne ont aussi prévu de se rencontrer vendredi à propos de la crise entre les deux pays ennemis. Déjà, la France demande à l’Iran de « renoncer à des représailles » contre Washington. « Personne ne veut la guerre. Tout le monde dit que ce n’est pas possible, il faut arrêter l’escalade. Donc prenons les moyens pour le faire », a déclaré lundi le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, à BFM TV. Il souhaite que la diplomatie stoppe l’escalade des tensions pour sauver l’accord sur le nucléaire iranien qui, affirme-t-il « tient toujours ». La France, cosignataire du texte avec le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Russie et la Chine, décidera à cet égard « dans les jours qui viennent » si elle déclenche le mécanisme de règlement des différends prévu dans l’accord, qui pourrait mener à terme au rétablissement de sanctions de l’ONU contre l’Iran.

Recueillement et appel à la vengeance

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Des centaines de milliers d’Iraniens dans les rues de Téhéran, voire des millions, selon la télévision d’État, ont paralysé le centre de la capitale iranienne pour une deuxième journée d’hommage au général Qassem Soleimani, tué vendredi dans une attaque de drone américaine. « Stupide Trump […], ne pense pas qu’avec le martyre de mon père, tout est fini », a lancé Zeinab, fille de Qassem Soleimani, promettant « des jours sombres » aux États-Unis. Dans la foule, la tristesse se mêlait à la colère alors que des Iraniens scandaient « Mort à l’Amérique », « Mort à Israël » et brûlaient des drapeaux américains et israéliens. Le cercueil de Soleimani sera mis en terre mardi à Kerman, sa ville natale.

L’UNESCO réagit aux menaces de Trump

En réponse à la menace du président américain de viser 52 sites « très importants pour l’Iran et pour la culture iranienne » si Téhéran s’en prend aux Américains, l’UNESCO a rappelé que les États-Unis avaient signé deux conventions protégeant les biens culturels et du patrimoine mondial en cas de conflit. « La Convention de 1972 prévoit notamment que chacun des États parties s’engage à ne prendre délibérément aucune mesure susceptible d’endommager […] le patrimoine culturel », a soulevé l’organisation dans un communiqué. L’Iran compte une vingtaine de sites classés au patrimoine mondial par l’UNESCO. « Ne menacez jamais la nation iranienne », a pour sa part tweeté le président iranien Hassan Rohani sur le média de prédilection de son homologue américain.

Les soldats canadiens restent

Pour des raisons de sécurité, les activités des soldats canadiens constituant la mission de formation militaire ont été suspendues en fin de semaine. Toutefois, cela ne veut pas dire que la mission dirigée par le Canada en Irak se termine définitivement, a laissé entendre le secrétaire général de l’OTAN lundi. « Nous avons suspendu notre mission de formation en raison de la situation sécuritaire sur le terrain, mais nous sommes prêts à reprendre la formation lorsque la situation le permettra », a déclaré M. Stoltenberg à l’issue d’une rencontre à Bruxelles avec les ambassadeurs des 29 pays membres de l’Alliance atlantique, dont le Canada. Les 250 soldats canadiens de la mission de formation ont pour mandat de lutter contre le groupe armé État islamique. Le Canada dirige la mission de formation de l’OTAN en Irak depuis sa création en 2018.

— Avec l’Agence France-Presse et La Presse canadienne