(Rome) Accusés d’avoir mal géré la crise sanitaire ou d’agir à contretemps, les gouvernements se retrouvent sur le banc des accusés tandis que la crainte d’une deuxième vague résultant de déconfinements hâtifs se fait jour dans divers pays.  

Une résurgence de l’épidémie de COVID-19 dans le pays où elle est apparue, voici six mois ? La municipalité de Pékin a fait fermer vendredi deux marchés et reporter la rentrée d’élèves du primaire après l’apparition de trois nouveaux dans la capitale chinoise.  

En Europe, où l’heure des comptes a sonné, le premier ministre italien Giuseppe Conte a été entendu vendredi pendant près de trois heures sur la gestion par le gouvernement de la crise du coronavirus.  

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Giuseppe Conte

Il a été auditionné par la procureure de Bergame, ville martyre de Lombardie et épicentre de l’épidémie qui a fait près de 34 000 morts dans la péninsule, dans le cadre d’une enquête sur la mise en place des « zones rouges ». Le gouvernement central et les dirigeants de la Lombardie se rejettent la responsabilité de la progression fulgurante du virus dans cette région et de la saturation du système hospitalier.  

« Lamentable »

Pour autant, alors que l’Italie s’apprête à lever les dernières restrictions, la majorité des Italiens semblait plus focalisés sur la reprise des matchs de soccer que sur l’audition de leur premier ministre.  

Car la Juventus de Turin doit affronter l’AC Milan vendredi en demi-finale de la Coupe d’Italie. Symboliquement, le match se jouera à Bergame.  

Mais la colère monte aussi en France, où une soixantaine de plaintes ont été déposées contre des membres du gouvernement.  

L’ancien ministre de l’Économie Arnaud Montebourg a estimé vendredi que l’État avait été « lamentable » et que « beaucoup de morts auraient pu être évitées si on avait organisé autrement la gestion de la crise sanitaire ».

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Arnaud Montebourg

En Grande-Bretagne, les compagnies aériennes British Airways, EasyJet et Ryanair ont décidé d’attaquer en justice le gouvernement pour tenter de mettre fin à la quarantaine imposée aux voyageurs arrivant au Royaume-Uni à l’approche de la saison estivale.

Cette période de 14 jours, en place depuis lundi, « va avoir un effet dévastateur sur le tourisme britannique et l’économie, et détruire des milliers d’emplois », ont-elle plaidé au moment où le Bureau national des statistiques révélait que le PIB s’est effondré de 20,4 % en avril.  

« 13 ans en arrière »

Le Royaume-Uni est le deuxième pays le plus endeuillé au monde avec plus de 41 000 morts. Au total, la COVID-19 a fait plus de 421 000 morts, et infecté plus de 7,5 millions de personnes dans 196 pays et territoires.

Nouvel épicentre de la pandémie, le continent latino-américain déplore plus de 74 000 victimes, dont plus de la moitié au Brésil où le seuil des 40 000 morts a été franchi.

La pandémie « peut nous ramener 13 ans en arrière », a averti Alicia Barcena, secrétaire générale de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC). « Nous devons voir comment éviter que la crise sanitaire ne devienne une crise alimentaire », a-t-elle ajouté.  

Mais le reste du monde n’est pas débarrassé du virus pour autant.  

En Iran, les autorités ont de nouveau exhorté la population à porter un masque en public alors que l’épidémie continue de progresser dans le pays, le plus touché au Moyen-Orient. Car, dans le métro de Téhéran par exemple, de nombreux passagers continuent de voyager le nez au vent.  

Deuxième vague

En Ukraine, la première dame, Olena Zelenska, a annoncé vendredi avoir été testée positive, mais pas son mari, le président Volodymyr Zelensky. La veille, le ministre de la Santé avait évoqué des « chiffres très alarmants », soit un bond de 689 nouveaux cas, incriminant un déconfinement trop large.

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Après avoir atteint un plateau, les États-Unis, qui ont enregistré plus de 113 000 décès, font face à une hausse des cas dans plusieurs États dont l’activité a redémarré dès le mois d’avril, comme la Géorgie.  Au risque de contrarier la timide reprise économique observée ces derniers jours.

Pour autant, « nous ne pouvons pas fermer l’économie de nouveau », a prévenu le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin.

Après avoir dévissé jeudi sur fond de craintes d’une deuxième vague aux États-Unis, les Bourses asiatiques et européennes se sont ressaisies vendredi.  

Il faut dire que la situation continue de s’améliorer en Europe sur le front sanitaire. Aussi, dès le 15 juin, les restrictions de circulation devraient être levées à l’intérieur de l’Union européenne par les trois quarts des États membres.  

Dans cette perspective, les pays les plus dépendants de la manne touristique font les yeux doux aux touristes étrangers. « L’Espagne vous attend », a lancé Madrid. « L’été grec, c’est plus que la mer et le soleil… c’est un état d’esprit », promet la Grèce.

Malgré la réouverture des frontières, le retour à la normale n’est pas encore total. Ainsi, la Fashion Week de Londres s’est ouverte vendredi mais, pour la première fois, il n’y aura pas de défilés : elle se tient en ligne.