«La droite sait qu'Obama ne peut être élu président sauf peut-être contre Attila le Hun.» Voilà ce qu'écrivait en mars 2007 Mark Penn, stratège principal d'Hillary Clinton, dans un mémo adressé à la sénatrice de New York. Dans le même document, il conseillait à sa cliente de cibler le «manque de racines américaines» du sénateur de l'Illinois. Je cite quelques extraits du mémo :

«Je ne peux imaginer que l'Amérique puisse élire un président en temps de guerre qui n'est pas fondamentalement américain dans sa pensée et ses valeurs... Chaque discours devrait contenir une phrase indiquant que vous êtes née au coeur de l'Amérique, dans la classe moyenne, au milieu du dernier siècle... Revendiquons notre propre américanité dans nos programmes, discours et valeurs...»

Ce mémo et plusieurs autres constituent la matière brute d'un article publié dans le numéro courant de la revue The Atlantic sur la défaite inattendue d'Hillary Clinton dans la course à l'investiture démocrate. Il en ressort que la sénatrice de New York n'a pas toujours suivi les conseils de son stratège et que son équipe de campagne était profondément divisée sur la marche à suivre pour vaincre Obama.

Du reportage, je retiens une anecdote : le 1er décembre 2007, Bill et Hillary Clinton participent à un dîner privé avec les membres de l'équipe éditoriale du Des Moines Register, le plus influent des quotidiens en Iowa. Ils sont stupéfaits en entendant les journalistes vanter l'habileté et l'efficacité des campagnes d'Obama et de John Edwards et s'étonner de la passivité de la campagne de Clinton. Voici comment Green raconte le reste de l'histoire :

«Le lendemain matin, lors d'un appel conférence avec son équipe, Clinton explosa, demandant pourquoi la campagne n'était pas plus agressive. Solis Doyle (directrice de la campagne) fut dépêchée le lendemain en Iowa pour superviser les dernières semaines. Dans les heures qui suivirent l'appel conférence, l'équipe paniquée produisit une attaque en règle contre Obama dénonçant sa soi-disant soif démesurée du pouvoir. La preuve? Il avait écrit à la maternelle un essai intitulé "Je veux devenir président". La campagne fut ridiculisée pendant des semaines.»