Au lendemain de l'élection de Barack Obama à la présidence, un bon ami et collègue de Québec m'envoit ce courriel de reproche :

Je vois que toi aussi, tu parles d'Obama comme d'un Noir. Il me semble pourtant qu'il est plus que ça. Il est à la fois Blanc et Noir, comme toi. Il est à la fois la réunion de deux grandes races. Il est le résultat d'un rapprochement, d'une fusion. Il est l'échec au découpage Blancs-Noirs. Le symbole me paraît trop puissant pour l'occulter comme le font les médias depuis le début.

L'auteure Marie Arana, qui est elle-même issue d'un mariage mixte, exprime la même idée aujourd'hui dans ce texte publié dans le Washington Post. J'en cite un long extrait :

Il est aussi à moitié Blanc.

À moins que la règle de la goutte de sang soit encore en vigueur, notre président élu n'est pas Noir.

Nous disons qu'il l'est - il le dit lui-même - parce que nous utilisons un langage et une logique dépassés. Après plus de 300 ans d'une histoire difficile, nous nous accrochons encore à une règle raciste : à moitié Noir est tout Noir. 50% égale 100%. Il n'y a pas de juste milieu.

Telle a été ma réaction quand j'ai lu ces mots sur la première page de ce journal au lendemain de l'élection : Obama passe à l'histoire : les É.U. élisent décisivement un premier président noir.

C'est comme si nous avions un pied dans l'avenir et un pied dans le Vieux Sud. Nous sommes assez sophistiqués sur le plan racial pour élire un président non-Blanc, et assez arriérés pour continuer à dire qu'il est Noir. Le progrès a dépassé notre vocabulaire.

Pour moi, et pour un nombre croissant de métis, Barack Obama n'est pas notre premier président noir. Il est notre premier président biracial, biculturel. Il est plus que la personnification d'un succès afro-américain. Il est le pont entre deux races, un symbole vivant de tolérance, un signe que les strictes catégories du passé doivent être abandonnées.

P.S. : Pour constater que le point de vue de mon ami de Québec et de l'auteure du Post ne fait pas l'unanimité, il suffit de consulter ce clip.

(Photo Reuters)