Le Sénat des États-Unis a approuvé par acclamation hier une résolution présentant des «excuses aux Noirs américains au nom du peuple américain, pour le mal qui leur été fait, ainsi qu'à leurs ancêtres qui ont souffert de l'escalavage et des lois Jim Crow». Comme on peut le lire dans cette dépêche, le texte reconnaît «l'injustice fondamentale, la cruauté, la brutalité et l'inhumanité de l'esclavage» et des lois ségrégationnistes connues sous le nom de «lois Jim Crow» qui ont été abolies en 1964 par la loi sur les droits civiques, le «Civil Rights Act» qui interdit toute forme de discrimination dans les lieux publics.

Mais le Sénat stipule bien que le texte de la résolution ne peut servir de «support» à une action en justice contre les États-Unis. Pour Randall Robinson, auteur d'un livre intitulé The Debt: What America Owes to Blacks, il ne s'agit donc que d'un pas vers l'objectif final de la campagne en faveur de réparations pour l'esclavage. Je traduis sa déclaration citée dans cet article du Washington Post :

«Beaucoup est dû, et c'est très quantifiable. C'est dû comme l'on est redevable pour tout labeur qui n'a pas été rémunéré, et jusqu'à ce que des décisions soient prises en ce sens, nous n'avons rien accompli.»

La question de l'indemnisation de l'esclavage ne date pas d'hier aux États-Unis. À la fin de la guerre de Sécession, le général Sherman avait proposé de donner à chaque ancien esclave «20 hectares de terre et une mule». La proposition était restée lettre morte. En 1963, Martin Luther King avait relancé l'idée des réparations dans son livre Why We Can't Wait. «Aucune somme d'argent ne peut compenser adéquatement l'exploitation des Noirs aux États-Unis à travers les siècles», avait écrit le pasteur. Mais, à son avis, il était au moins possible de déterminer un montant représentant les salaires non payés aux esclaves. Ce débat a pris de l'ampleur en 2000 avec la publication du livre de Robinson, un des héros américains du combat pour le boycottage de l'Afrique du Sud au temps de l'apartheid.

Les militants en faveur des réparations pour l'esclavage ne réclament plus «20 hectares et une mule», mais la création d'un fonds d'éducation pour les descendants des esclaves.