«Des hauts responsables du Vatican, dont le futur pape Benoît XVI, n'ont pas défroqué un prêtre qui s'était livré à des abus sexuels sur près de 200 enfants sourds, même si plusieurs évêques américains les avaient avertis que le défaut d'agir dans cette affaire pourrait éclabousser l'Église, selon des nouveaux documents de l'Église dévoilés dans le cadre d'une action devant la justice.»

Ainsi commence un reportage publié sur le site du New York Times à propos d'un camouflage mettant en cause celui qui a été préfet de la Congrégation pour la doctrine de la Foi de 1981 à 2005. Le prêtre de Milwaukee impliqué dans cette affaire, Lawrence Murphy, a travaillé dans une école pour enfants sourds de 1950 à 1974. Il n'a pas été accusé ou discipliné par le système de justice de l'Église. Il n'a pas non plus été interrogé ou arrêté par la police, même si certaines de ses victimes ont porté plainte. Je cite dans le texte un extrait de l'article du Times :

Instead of being disciplined, Father Murphy was quietly moved by Archbishop William E. Cousins of Milwaukee to the Diocese of Superior in northern Wisconsin in 1974, where he spent his last 24 years working freely with children in parishes, schools and, as one lawsuit charges, a juvenile detention center. He died in 1998, still a priest.

Selon le New York Times, les lettres datées du milieu des années 1990 entre les évêques du Wisconsin et les responsables du Vatican, dont le cardinal Joseph Ratzinger, le futur pape, démontrent que la priorité de ces derniers était d'éviter de ternir l'image de l'Église. On trouve ici certains des documents dont le Times a obtenu copie.

Cette histoire éclate au moment où le pape est confronté à un autre scandale d'abus sexuels en Allemagne.

P.S. : On trouve ici la déclaration émise aujourd'hui par le Vatican à la suite de la publication de l'article du Times. J'en cite un extrait :

«À la fin des années 90, plus de vingt ans après le signalement des abus aux responsables diocésains et à la police, la Congrégation pour la doctrine de la foi a été confrontée pour la première fois à la question du traitement canonique du cas Murphy. La Congrégation a été informée de l'affaire car elle comportait la sollicitation sexuelle dans le confessionnal, qui constitue une violation du sacrement de pénitence. Il est important de noter que la question canonique présentée à la Congrégation n'avait aucun lien avec une poursuite judiciaire ou civile potentielle contre le P. Murphy.

Dans ce genre de cas, le Code de droit canonique ne prévoit pas de peines automatiques mais recommande que soit prononcé un jugement qui n'exclut pas la plus grande peine ecclésiastique qui est le renvoi de l'état clérical (cf. Canon 1395, n. 2). Etant donné que le P. Murphy était âgé et en très mauvaise santé, qu'il vivait retiré du monde et qu'aucun signalement d'abus n'avait été enregistré depuis plus de vingt ans, la Congrégation pour la doctrine de la foi a suggéré que l'archevêque de Milwaukee envisage de traiter cette question par exemple en réduisant le ministère public du P. Murphy et en demandant que le P. Murphy accepte l'entière responsabilité pour la gravité de ses actes. Le P. Murphy est décédé environ quatre mois plus tard, sans nouvel incident.»

(Photo AFP)