Dans un article étoffé publié dans le nouveau numéro du mensuel The Atlantic et intitulé «Le Point de non-retour», le journaliste Jeffrey Goldberg estime à plus de 50% les probabilités d'une attaque israélienne contre les installations nucléaires d'Iran.

Goldberg en vient à cette conclusion après avoir parlé à plusieurs responsables israéliens et américains. Son article contient un portrait fascinant de Benjamin Netanyahu, dont les décisions semblent être dictées en partie par son besoin de s'affirmer face à un père qui a toujours vu d'un mauvais oeil les démarches de paix avec les Palestiniens, y compris celles que son fils a entreprises lors de son mandat précédent à titre de premier ministre.

Goldberg rappelle que la politique iranienne de Netanyahu est également dictée par son refus d'envisager «un culte messianique apocalyptique en possession d'armes nucléaires». De son côté, l'administration Obama répète à qui veut l'entendre qu'elle ne rejette pas l'option militaire pour freiner les ambitions nucléaires de l'Iran. Cela dit, il est clair qu'elle n'est pas intéressée à une troisième guerre au Moyen-Orient, selon Goldberg. Quant aux Israéliens, ils ne se feraient aucune illusion concernant les conséquences de frappes israèliennes contre l'Iran. Je cite un extrait de l'article de Goldberg sur ce sujet (merci à patafouin pour la traduction) :

Peu importe s'ils (les Israéliens) réussissent à détruire les centrifugeuses, les usines de missiles et d'ogives, ou qu'ils échouent misérablement à seulement érafler le programme nucléaire iranien - ils ont de bonnes chances de changer le Moyen-Orient pour toujours, de déclencher des représailles meurtrières, et même une guerre régionale totale pouvant mener à la mort de milliers d'Israéliens et Iraniens, et possiblement d'Arabes et d'Américains aussi; de créer une crise pour Barack Obama qui réduirait le conflit afghan à une bagarre d'écoliers en regard de sa signification et sa complexité; de rompre les relations entre Jérusalem et Washington, qui est le seul allié notable d'Israël; de solidifier par inadvertance le règne quelque peu ténu des mollahs de Téhéran; de causer une escalade des prix du pétrole à des niveaux cataclysmiques jamais vus depuis l'automne 2008 et peut-être même depuis le choc pétrolier de 1973; de placer les communautés de la diaspora juive en danger mortel, en faisant d'eux des cibles d'attaques terroristes commanditées par l'Iran, comme ils le furent par le passé, d'une façon limitée mais néanmoins mortelle; et d'accélérer la conversion d'Israël d'un refuge pour un peuple persécuté autrefois admiré à un peuple de lépreux parmi les nations.

L'article de Goldberg contient des détails inédits concernant la campagne de George W. Bush pour freiner les élans belliqueux de Dick Cheney et de ses alliés vis-à-vis de l'Iran. L'ex-président se moquait notamment des commentateurs néoconservateurs William Kristol et Charles Krauthammer en les appelant les bombing boys.

(Illustration The Atlantic)