Le journaliste Jeremy Scahill répond à cette question par l'affirmative dans cet article publié sur le site internet de l'hebdomadaire The Nation. Selon lui, le président yéménite Ali Abdullah Saleh a renoncé à gracier le journaliste Abdulelah Haider Saye après que Barack Obama se fut inquiété de sa remise en liberté lors d'un entretien téléphonique le 2 février 2011.

Accusé d'être propagandiste pour la branche d'Al-Qaïda au Yémen, Saye avait été condamné à cinq ans de prison en janvier 2011 lors d'un procès dont le déroulement a été critiqué par l'organisme Human Rights Watch.

Scahill, qui s'est fait connaître pour des reportages et un livre sur l'entreprise de sécurité privée américaine Blackwater, présente Saye comme un journaliste courageux et consciencieux qui a soulevé l'ire des États-Unis en réalisant des entrevues avec feu Anouar al-Aulaqi, un chef d'Al-Qaïda au Yémen tué par un drone américain en septembre 2011, et en révélant des «faits» gênants sur les actions américaines dans son pays.

Ces faits sont liés aux frappes aériennes du 17 décembre 2009 contre un camp d'entraînement d'Al-Qaïda dans le sud du Yémen. Saye s'est rendu sur place pour prendre des photographies prouvant que les missiles utilisés dans l'attaque étaient bel et bien américains. Il a également établi que 14 femmes et 21 enfants faisaient partie des 41 victimes.

Scahill explique que Saye est parvenu à interviewer Anouar al-Aulaqi et à entrer dans un camp d'Al-Qaïda grâce à ses liens avec un parent de sa femme considéré comme un terroriste par les gouvernements yéménite et américain. Le journaliste américain défend cependant l'intégrité de son collègue yéménite et accuse ni plus ni moins le président Obama de maintenir ce dernier en prison pour l'empêcher de produire d'autres reportages gênants sur les retombées des actions américaines au Yémen.

Le journaliste d'ABC Jake Tapper a posé aujourd'hui une question sur cette affaire au porte-parole de la Maison-Blanche, Jay Carney. Ce dernier lui a promis de se renseigner et de revenir avec une réponse.

Le blogueur Kevin Drum de Mother Jones, une autre revue de gauche, a mis en cause le reportage de Scahill ici et ici.