Barack Obama et les ténors de la droite américaine ont fait montre d'une rare unité de vue en rendant hommage à Nelson Mandela hier.

La sincérité du premier président américain de couleur ne peut être mise en doute. En 1979 et 1980, il a connu son éveil politique en participant, sur le campus du collège Occidental, en Californie, à la campagne de désinvestissement contre l'Afrique du Sud et son régime d'apartheid.

Campagne marquante pour le politicien qu'il allait devenir, comme il le souligne dans Les rêves de mon père, son autobiographie :

«Les mois passant, je me trouvai chargé d'un rôle plus important - contacter les représentants du Congrès national africain, l'ANC, pour leur demander de venir prendre la parole sur le campus, écrire à la faculté, imprimer des tracts, discuter stratégie - et je remarquai que les gens commençaient à prêter l'oreille à mes opinions. Ce fut une découverte qui me donna l'appétit des mots. Non pas des mots derrière lesquels je me cacherais, mais des mots qui pouvaient porter un message, soutenir une idée.»

On ne peut non plus douter de la sincérité des John Boehner, Marco Rubio ou Ted Cruz, qui ont salué Mandela en rappelant son combat pour la liberté, la justice et l'équité, comme on peut le lire ici. Mais on peut sans doute leur reprocher une sorte d'amnésie qui leur permet aujourd'hui de passer sous silence l'opposition d'un des grands leaders de leur parti, Ronald Reagan, à l'ANC de Mandela, jugé dangereux et pro-communiste, et l'«engagement constructif» de son administration envers le régime d'apartheid.

Durant les années Reagan à la Maison-Blanche, Dick Cheney menait de son côté le combat de la droite américaine contre l'ANC à la Chambre des représentants, votant notamment contre une résolution appelant à la reconnaissance du parti sud-africain, à la libération de Mandela et à des négociations avec la majorité noire.

Il faut lire les commentaires à la suite de ce billet publié sur le site de la revue conservatrice National Review à propos des réactions des Boehner, Rubio et cie à la mort de Mandela pour constater que les arguments invoqués par les Reagan, Cheney et cie à l'époque ont encore aujourd'hui des défenseurs aux États-Unis.