N'est-il pas un peu tôt pour faire l'autopsie de la campagne de Bernie Sanders? Pas du tout, si l'on en juge par cet article publié aujourd'hui à la une du New York Times, et dont les sources principales viennent de l'entourage du sénateur du Vermont.

Certes, le quotidien s'assure de préciser que la course à l'investiture pourrait connaître des rebondissements inattendus d'ici juin et que Sanders lui-même se bat encore pour la victoire. Mais un des passages les plus révélateurs de cette autopsie est le suivant :

«[Sanders] était à l'origine sceptique sur ses chances de battre Mme Clinton, et sa mission en 2015 était de propager son message politique au sujet d'une Amérique manipulée plutôt que de tout faire pour remporter l'investiture. Quand les électeurs ont commencé à s'enflammer pour son message et qu'il s'est mis à croire qu'il pourrait battre Mme Clinton, elle était déjà en bonne voie de se doter d'une avance quasi insurmontable dans la course aux délégués.»

À en croire le Times et ses sources, la décision de Sanders de ne pas renoncer à ses responsabilités de sénateur en 2015 a contribué à ses défaites en Iowa et au Nevada, deux des trois premiers États qui ont voté en 2016. Si le sénateur s'était lancé corps et âme dans la campagne durant l'été et l'automne qui ont précédé ces premiers scrutins, il aurait pu les remporter et mettre en danger la candidature de l'ancienne secrétaire d'État.

Les conseillers de Sanders estiment aussi qu'il aurait également pu ébranler Clinton s'il avait soulevé dès l'automne dernier la question de ses trois allocutions devant Goldman Sachs, qui lui ont valu 675 000$, plutôt que d'attendre à la veille des caucus de l'Iowa pour le faire.

Le Times affirme que Sanders a d'abord refusé cette approche en estimant qu'il s'agissait d'une attaque personnelle et que Clinton «[avait] le droit de faire de l'argent». Disons que le sénateur a changé d'avis sur ce sujet.

Il y a beaucoup de «si» dans l'autopsie du Times. L'un d'eux fait référence au manque flagrant d'appuis de Sanders chez les Noirs du sud des États-Unis. S'il avait consacré plus de temps et d'argent dans cette région, il aurait pu minimiser ses pertes en termes de délégués. Peut-être.

L'autopsie du Times, faut-il le rappeler, est publié à la veille des primaires du Wisconsin, où Sanders est favori pour l'emporter, et celles de New York, où le sénateur aimerait bien surprendre Clinton.

Mais la décision du Times de publier ce genre d'article est moins étonnante que celle des membres de l'entourage de Sanders d'y collaborer!