Après avoir fait campagne contre la «classe de donateurs» républicains qui manipule le système au détriment de l'Américain ordinaire, Donald Trump a nommé hier l'un de ses membres les plus actifs au poste de secrétaire à l'Éducation : Betsy DeVos.

La bru d'un des cofondateurs d'Amway est l'une des deux femmes que le président désigné a appelées à joindre son cabinet à la veille de la Thanksgiving. L'autre est la gouverneure de Caroline-du-Sud Nikki Haley, choisie pour représenter les États-Unis à l'ONU à titre d'ambassadrice. Demain, la sélection du neurochirurgien retraité Ben Carson au poste de secrétaire au Logement et au Développement urbain devrait être annoncé et contribué à diversifier encore davantage une équipe qui ne comptait jusqu'à hier matin que des hommes blancs.

DeVos a en commun avec Haley et Carson de n'avoir aucune expérience professionnelle dans le domaine où elle interviendra si le Sénat confirme sa nomination. L'éducation publique fait cependant partie des causes qu'elle a tenté d'influencer par le biais de sa fortune.

La philanthrope milliardaire, qui a été présidente du Parti républicain du Michigan, est l'une des chefs de file d'un mouvement appelé «school choice» (le choix en matière scolaire. Elle partisane des «school vouchers», ces allocations scolaires (et publiques) qui doivent permettre en principe aux familles moins nanties d'inscrire leurs enfants dans des écoles privées ou religieuses. Elle a également joué un rôle clé dans la multiplication des «charter schools» dans son État, et plus particulièrement à Detroit.

Ces «écoles à charte» ont des partisans tant chez les républicains que chez les démocrates. Elles permettent en principe aux communautés de lancer des écoles publiques qui ont une plus grande liberté d'innover. L'expérience de Detroit, où 80% des «charter schools» ont été fondées par des sociétés à but lucratif, représente cependant l'exemple le plus frappant d'un transfert de l'argent destiné à l'école publique vers des écoles privées ou à but lucratif, transfert que DeVos et ses alliés sont accusés par leurs critiques d'encourager.

Le résultat de l'expérience de Detroit, comme on peut le constater dans cet article triste à pleurer, est un fiasco. Un fiasco qui se perpétue en partie à cause de lois adoptées par des élus républicains dont les campagnes électorales sont financées par DeVos et d'autres idéologues partageant sa hantise de l'école publique et des syndicats d'enseignants.

C'est quand même extraordinaire : à Detroit, les écoles publiques traditionnelles, reconnues pour leur piètre performance, obtiennent de meilleurs résultats que les «charter schools» gérées par les sociétés à but lucratif que défend DeVos. Ça promet pour la suite.

DeVos est la fille d'Edgar Prince, un ancien de l'US Air Force qui est devenu milliardaire après avoir fondé une entreprise spécialisée dans la fabrication de pièces pour l'automobile. Elle est aussi la soeur d'Erik Prince, fondateur de la société Blackwater, la plus grande armée privée au monde, qui a notamment sévi en Irak avant d'être rebaptisée en 2009.