Donald Trump peut bien publier des tweets sur la NFL. Dès la semaine dernière, il devait voir venir les deux défaites qu'il a subies hier. Échec de l'abrogation de l'Obamacare qu'il appelait de ses voeux depuis le début de sa campagne présidentielle. Et échec de son candidat lors de la primaire républicaine en vue de l'élection partielle pour l'ancien siège au Sénat de Jeff Sessions en Alabama.

Trump appuyait le sénateur par intérim Luther Strange, un géant de 2,05 m. «Je soutiens le grand Luther Strange, car il m'a toujours été loyal et utile!» avait-il tweeté la semaine dernière avant de se rendre en Alabama pour faire campagne aux côtés de l'ancien ministre de la Justice de l'État, qui avait été nommé au Sénat par le gouverneur d'Alabama après la nomination de Sessions au poste de ministre de la Justice.

Strange jouissait également de l'appui de Mitch McConnell, chef de la majorité républicaine au Sénat, dont les alliés ont dépensé plus de 10 millions de dollars pour l'aider à se faire élire.

Il n'en fallait pas plus pour que Strange soit qualifié de «candidat de l'establishment» et du «marais» par Steve Bannon, Sarah Palin et autres ténors du populisme de droite, qui ont jeté leur dévolu sur le très controversé Roy Moore. Âgé de 70 ans, l'ancien président de la Cour suprême d'Alabama a remporté 54,6% des suffrages contre 45,4% pour son rival.

Moore fera face au démocrate Doug Jones, ancien procureur fédéral, à l'occasion de l'élection partielle du 12 décembre. S'il l'emporte, ce théocrate anti-gai et anti-islam deviendra sans contredit le sénateur le plus conservateur du Sénat américain. Et sa personnalité de trublion ultraconservateur devrait non seulement compliquer la vie de McConnell mais également servir de cible aux démocrates en vue des élections de mi-mandat de 2018.

Moore s'est notamment fait connaître en 2003 en refusant de se plier à un jugement lui ordonnant de déplacer une stèle monumentale des Dix commandements placée devant l'entrée de l'édifice de la Cour suprême d'Alabama. Il a ajouté à sa notoriété nationale et internationale en juin 2016 en s'opposant à l'application dans son État de la décision de la Cour suprême des États-Unis sur le mariage gai.

Les deux controverses lui ont valu d'être démis de ses fonctions. Pour donner une idée du style de cet homme qui croit à la suprématie de la loi divine, citons une de ses déclarations sur l'homosexualité : «Le comportement homosexuel est un crime contre la nature, un mal inhérent et un acte si haineux qu'il défie notre capacité à le décrire.»

Faisant contre mauvaise fortune bon coeur, Trump a félicité Moore sur Twitter hier soir tout en supprimant ses tweets d'appui à Strange.

Et Bannon dans tout ça? L'ex-stratège présidentiel, qui a fait campagne aux côtés de Moore, espère que sa victoire est le début d'un mouvement qui permettra à d'autres candidats populistes d'évincer des élus républicains liés au «marais» de Washington.