«Cet homme ne peut être président», a écrit Lisa Page, avocate du FBI, dans un texto envoyé à son amoureux, Peter Strzok, agent du FBI spécialisé dans le contre-espionnage et affecté à l'enquête du procureur spécial Robert Mueller sur l'affaire russe.

«J'ai peur pour notre organisation», a écrit Strzok dans un autre texto.

«Dieu, Trump est un être humain détestable. Il est un idiot», a écrit Page dans un autre texto.

«Et pourtant, il pourrait gagner», a répondu Strzok, qui a également employé les mots «idiot» et «nul» pour qualifier Donald Trump pendant la campagne présidentielle de 2016.

Le ministère de la Justice a diffusé hier soir ces textos, prenant par surprise l'équipe de l'inspecteur général du ministère, qui a amassé ces documents dans le cadre de son enquête sur la gestion par le FBI de l'affaire des courriels d'Hillary Clinton et de l'affaire russe.

La diffusion de ces textos est intervenue à la veille de l'audition du ministre adjoint de la Justice Rod Rosenstein devant la commission des Affaires juridiques de la Chambre des représentants. Citant les textos en exemple, les membres républicains de cette commission ont mis en cause l'impartialité de l'enquête sur l'affaire russe.

Mueller, faut-il rappeler, a écarté Strzok de son équipe en juillet dernier après avoir eu vent des textos en question. Il faut également souligner que Strzok et Page n'ont pas réservé leurs critiques à Trump, cassant également du sucre sur le dos d'Hillary Clinton, Bernie Sanders et Barack Obama.

Mais les alliés républicains du Congrès ne se sont arrêtés qu'aux critiques des deux employés du FB I à l'égard de Trump. «Les enquêtes du ministère de la Justice ne doivent pas être entachées par des individus qui imposent leurs propres préjugés politiques», a déclaré le président de la commission des Affaires juridiques, Bob Goodlatte.

Roseinstein a défendu l'impartialité de Mueller et de ses enquêteurs. «Nous reconnaissons que nous avons des employés avec des opinions politiques. Il nous incombe de nous assurer que ces opinions n'influencent pas leur travail. Je crois que (Robert) Mueller comprend cela et qu'il mène son enquête de manière appropriée», a déclaré le numéro deux du ministère de la Justice.

Roseinstein n'a pas convaincu les républicains. Le représentant du Texas Louis Gohmert a estimé qu'il était impossible de croire que les opinions «dégoûtantes» de Strzok et Page n'aient pas influencé leur travail.

Le représentant démocrate de New York Jerrold Nadler a répliqué en faisant valoir qu'il n'y avait rien de répréhensible à ce que deux responsables du FBI expriment en privé des opinions partagées par des millions d'Américains.

La mise en cause de l'impartialité de l'enquête de Mueller survient au moment où les avocats personnels de Donald Trump attaquent de leur côté l'intégrité du FBI et du ministère de la Justice. Hier, un de ces avocats, Jay Sekulow, a demandé la nomination d'un procureur spécial pour enquêter sur le FBI et le ministère de la Justice.

Sekulow a tenu à préciser qu'il n'avait aucun reproche à faire concernant Mueller, un républicain, et son équipe. Il s'est cependant dit troublé par un reportage de Fox News sur la démotion de Bruce Ohr, un responsable du ministère de la Justice à la suite du déclenchement d'une enquête interne sur ses contacts avec GPS Fusion, la boîte de recherche qui a commandité le dossier sur les liens de Donald Trump avec la Russie.

Pour les démocrates, les alliés et les avocats de Trump se livrent à des manoeuvres de diversion pour détourner l'attention du public d'une enquête qui se rapproche dangereusement de la Maison-Blanche.