La crémation est tolérée dans l'Église catholique, mais les cendres des morts doivent être conservées dans des cimetières et surtout pas gardées à la maison ou dispersées dans la nature, insiste le Vatican dans un document publié mardi.

Garder les cendres dans un cimetière ou un autre lieu sacré réduit « le risque de soustraire les défunts à la prière et au souvenir de leur famille et de la communauté chrétienne », a insisté devant la presse le gardien du dogme catholique, le cardinal allemand Gerhard Ludwig Müller.

« On évite ainsi également les éventuels oublis et manques de respect qui peuvent advenir surtout après la disparition de la première génération », a souligné Mgr Müller, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi.

À une semaine du jour des Morts, célébré le 2 novembre, il a aussi rappelé que « la conservation des cendres dans l'habitation domestique n'est pas autorisée ».

Les évêques peuvent cependant accorder une autorisation « en cas de circonstances graves et exceptionnelles liées à des conditions culturelles à caractère local ». Le texte du Vatican ne donne pas d'exemples, mais cela pourrait être le cas des zones de guerre où une inhumation serait remise à plus tard.

« Un corps n'est pas une propriété privée de la famille, une célébration publique de l'Église est une vieille tradition », a commenté le théologien conservateur allemand, répondant à une journaliste américaine qui lui rappelait que la conservation d'urnes funéraires à la maison était fréquente dans son pays.

Il n'est pas non plus permis pour les catholiques de disperser des cendres « dans l'air, sur terre, dans l'eau ou de toute autre manière », a martelé le cardinal allemand.

La conservation des cendres « dans des souvenirs, des bijoux ou d'autres objets » est également totalement proscrite. Et l'Église interdit une distribution des cendres d'un défunt entre différents cercles d'une famille.

Cette recommandation ne sera cependant pas appliquée a posteriori aux reliques de saints dont des restes ont été conservés dans divers endroits au cours des siècles passés, « au risque de provoquer une guerre entre fidèles ! », a admis mardi un consultant du cardinal, Msg Angel Rodríguez Luño.

L'ensevelissement des morts prôné par l'Église

Au-delà de la crémation, le nouveau texte du Vatican vise essentiellement à rappeler la position traditionnelle de l'Église, qui recommande toujours « avec insistance » que les corps des défunts soient ensevelis dans des cimetières ou autres lieux saints.

Cela favorise « le souvenir ainsi que la prière de la famille et de toute la communauté chrétienne », souligne le cardinal Müller. L'ensevelissement répond aussi à la foi chrétienne en la résurrection et permet de « mettre l'accent sur la grande dignité du corps humain, en tant que partie intégrante de la personne », explique-t-il.

Il rejette au passage des « conceptions erronées de la mort », considérée par exemple par certains non catholiques comme un anéantissement définitif de la personne, un moment de sa fusion avec la mère Nature, ou encore une étape en vue d'une réincarnation.

La nouvelle instruction, approuvée par le pape, remplace un texte de 1963 qui admettait déjà que la crémation n'était pas « contraire en soi à la religion chrétienne » à condition que le souhait du défunt n'exprime pas une « haine » de l'Église catholique. Plus spécifiquement, le Vatican considère en effet que l'incinération « ne touche pas à l'âme » et « n'empêche pas la toute-puissance divine de ressusciter le corps ».

Un demi-siècle après la précédente instruction, la pratique des crémations s'est largement répandue, d'où le désir du Vatican de mieux encadrer les modalités de conservation des cendres.

Reste que l'intervention technique de la crémation est jugée « peu naturelle » et « brutale » pour les proches du défunt, a insisté mardi devant la presse le père Serge-Thomas Bonino, secrétaire de la Commission théologique internationale.

Pour ce théologien français, « l'incinération est une forme de privatisation de la mort qui ne permet pas à la famille de s'habituer progressivement à la perte ».