En marge des commémorations en hommage aux victimes de Charlie Hebdo, le Canada a participé, dimanche à Paris, à une réunion internationale qualifiée d'«exceptionnelle» sur les actions à mener pour lutter contre le terrorisme, notamment sur Internet et les réseaux sociaux.

Le ministre de la Sécurité publique du Canada, Steven Blaney, ainsi que ses homologues d'une douzaine de pays et de l'Union européenne ont d'entrée de jeu condamné d'une seule voix la «terrible et lâche attaque terroriste» contre le journal français, ainsi que l'assassinat d'une policière municipale à Montrouge et de quatre personnes à Paris, dans l'attaque d'un supermarché cacher.

Les pays présents ont jugé essentiel de coordonner leurs démarches pour lutter contre la «menace terroriste multiforme» à laquelle ils sont tous confrontés. «Il faut lutter ensemble contre le terrorisme», ont-ils conclu dans une déclaration commune transmise au terme de la rencontre.

Ils considèrent qu'il faut «contrecarrer» l'action des réseaux terroristes et «entraver» leurs déplacements.

Les pays ayant pris part aux discussions estiment qu'il faut lutter contre la radicalisation, en mentionnant particulièrement l'importance d'initiatives sur Internet.

Le Web fourmille de vidéos produites par les partisans des organisations terroristes comme Al-Qaïda et le groupe État islamique, qui font l'apologie de la violence, de la haine, du racisme et d'antisémitisme, a soutenu le ministre français de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, au terme de la rencontre.

Quelques heures plus tôt, une vidéo qui aurait été réalisée par Amedy Coulibaly, à l'origine de l'attaque contre le marché cacher, a d'ailleurs été publiée sur Internet. Dans l'enregistrement posthume, il justifie ses actes et prête allégeance au groupe État islamique, avec une mitraillette à ses côtés.

C'est à ce genre de contenu vidéo que les pays réunis dimanche matin veulent s'attaquer.

«Préoccupés par l'utilisation d'Internet à des fins de haine et de violence, nous sommes déterminés à ce que cet espace ne soit pas perverti à ces fins, tout en garantissant qu'il reste, dans le strict respect des libertés fondamentales, un lieu de libre expression, respectant pleinement la loi», peut-on lire dans la déclaration publiée au terme de la réunion.

Les pays participants estiment qu'un travail doit être mené avec les grands fournisseurs de service Internet, afin que les contenus incitant à la haine et à la terreur soient signalés rapidement.

De plus, les contenus haineux doivent être retirés «lorsque cela est approprié et/ou possible». La propagande terroriste constitue une grande menace pour les jeunes «particulièrement exposés à l'endoctrinement», disent les pays impliqués dans les discussions.

Ils veulent concevoir des messages positifs, ciblés et accessibles pour contrer la propagande terroriste. L'Union européenne dit à ce sujet vouloir lancer une stratégie de communication afin «d'éveiller les consciences et promouvoir le respect des valeurs et des droits fondamentaux».

Le ministre français de l'Intérieur a salué la présence du Canada à la rencontre, après que le pays eut été la cible d'attaques à Saint-Jean-sur-Richelieu et dans l'enceinte du parlement, l'automne dernier.

«Je veux remercier le ministre canadien de la Sécurité publique, Steven Blaney, qui a eu à gérer tout récemment une situation dramatique de crise liée au terrorisme dans son pays», a déclaré M. Cazeneuve au terme de la rencontre internationale qu'il a initiée.

Les autorités policières et judiciaires doivent collaborer davantage et partager encore plus leurs renseignements, a-t-il insisté.

«Le terrorisme a pris une dimension européenne et internationale. Je veux souligner la qualité exceptionnelle de notre collaboration avec les États-Unis et le Canada, qui repose sur la nécessité de protéger nos populations contre une menace commune et de défendre les mêmes valeurs», a ajouté M. Cazeneuve.

M. Blaney a révélé sur son compte Twitter avoir rencontré une femme témoin de l'attaque contre Charlie Hebdo après son arrivée en sol français. «La France démontre une résilience exemplaire et montre qu'elle ne se laissera jamais intimider», a-t-il dit sur le réseau social.

Les événements des derniers jours pourraient bien accélérer la mise en place sur le territoire de l'Union européenne de «données des dossiers passagers» (Passenger Name Record), qui sont composées d'informations personnelles concernant les déplacements des voyageurs.

Un tel système est déjà en place au Canada, aux États-Unis et dans plusieurs autres juridictions, mais les pays européens se montraient réticents à mettre en place cette initiative en raison de craintes relatives au respect de la vie privée.

«Nous sommes toujours plus convaincus du besoin crucial et urgent de progresser vers l'établissement du cadre pour un 'Passenger Name Record' européen», ont conclu les pays réunis.