Le terrorisme motivé par la religion, essentiellement l'islam radical, a connu une croissance fulgurante depuis le début des années 2000, démontre l'Index 2014 du terrorisme global. Or, ces groupes sont beaucoup plus lents à mettre fin à leurs activités que ceux à caractère politique ou nationaliste, constate une autre étude du centre de recherche RAND. Dans la foulée des attentats de Paris, La Presse brosse aujourd'hui le portrait du terrorisme à partir des plus récentes études. Celles-ci permettent de comprendre qu'une issue négociée est peu probable.

Près de 18 000 morts

Le terrorisme a coûté la vie à tout près de 18 000 personnes en 2013, soit cinq fois plus qu'en 2000, selon l'Index 2014 du terrorisme global. Ce rapport réalisé par l'Institute for Economics and Peace, à Londres, a analysé 48 000 attentats perpétrés de 2000 à mars 2014, qui ont fait 107 000 morts durant cette période. L'étude constate que le nombre d'attentats avait commencé à décliner à partir de 2007, mais s'est grandement accru depuis le début de la guerre civile en Syrie. En 2013, on a recensé 24 pays où plus de 50 personnes sont mortes dans un attentat terroriste, contre 15 l'année précédente. Le terrorisme a également touché 36 autres pays où l'on rapporte au moins un mort.

L'Occident peu frappé

Malgré la multiplication des attentats, l'Occident reste relativement peu touché, observe l'Index 2014 du terrorisme global. Depuis 2000, seulement 7% des attaques ont été perpétrées dans les pays membres de l'OCDE, celles-ci représentant 5% des morts dues au terrorisme. La majorité des attentats ont eu lieu dans cinq pays, soit l'Irak, l'Afghanistan, le Pakistan, le Nigeria et la Syrie.

Les attentats terroristes où les morts se comptent par dizaines frappent l'imaginaire, mais ces attaques sont plutôt rares. L'Index 2014 du terrorisme global évalue même que la moitié des attentats n'ont fait aucun mort. Seulement 10% des attaques se sont soldées par la mort de plus de 5 personnes.

Au début des années 2000, les groupes nationalistes séparatistes représentaient les principaux auteurs d'attentats terroristes. Si cette forme de terrorisme est relativement stable depuis, les attaques inspirées par des motifs religieux ont augmenté en flèche, représentant aujourd'hui plus des trois quarts des attaques.

Difficiles à mater

Le centre de recherche RAND, basé en Californie, a étudié l'espérance de vie des groupes terroristes en analysant 648 regroupements ayant sévi entre les années 1968 et 2006. Bonne nouvelle: près des deux tiers d'entre eux ont fini par cesser leurs activités. Le hic? Les groupes religieux mettent beaucoup plus de temps à disparaître. Dans les quatre décennies étudiées, seulement le tiers de ces terroristes ont mis fin à leurs attaques, principalement après avoir été démantelés par des interventions policières. La même étude démontre toutefois que, depuis 1968, aucun groupe terroriste religieux n'a fini par atteindre son objectif.

Comment en finir?

Comment les groupes terroristes disparaissent-ils?

Pour mettre fin au terrorisme, mieux vaut miser sur une solution politique et investir dans ses forces policières, conclut l'étude de la RAND. L'analyse des groupes ayant cessé leurs activités démontre que plusieurs ont fini par renoncer au terrorisme pour devenir des partis légitimes. Mais trouver une solution politique avec des terroristes inspirés par la religion s'avère difficile, observe Steve Killelea, directeur général de l'Institute for Economics and Peace. «Étant donné la nature théologique du problème, c'est très difficile pour des acteurs extérieurs d'avoir une quelconque influence.» Les policiers représentent quant à eux la deuxième solution la plus efficace, leur travail ayant permis d'arrêter ou de tuer les terroristes dans 40% des cas. Les militaires ont toutefois un taux de succès plutôt faible, note le RAND.

Islam radical

Quatre principaux groupes terroristes

Al-Qaïda 

Victimes tuées: 8585

Combattants: 3700 à 19 000

- Talibans 

Victimes tuées: 8763

Combattants: 36 000 à 60 000

- Boko Haram 

Victimes tuées: 3440

Combattants: 500 à 9000

- État islamique 

Victimes tuées: 3111

Combattants: 20 000 à 30 500

Au moins 358 groupes terroristes sont présentement actifs dans le monde, mais quatre d'entre eux ont été responsables à eux seuls des deux tiers des victimes, en 2013. Depuis l'an 2000, on évalue qu'ils auraient tué près de 25 000 personnes. L'Index 2014 du terrorisme global note que les quatre principaux groupes terroristes présentement actifs sont basés sur des interprétations extrémistes du wahhabisme. Les plus récentes données du rapport datant de mars 2014, les profils du groupe État islamique et de Boko Haram risquent d'avoir considérablement changé, ceux-ci ayant été très actifs l'an dernier.

Bombe, arme de choix

Les explosifs représentent l'arme de choix des terroristes dans le monde, près des deux tiers de leurs victimes ayant ainsi trouvé la mort. Les différents groupes adoptent toutefois des stratégies bien différentes. Ainsi, le groupe nigérian Boko Haram mise davantage sur les armes à feu pour faire régner la terreur, la moitié de ses victimes étant tombées sous les balles. À l'inverse, le groupe État islamique mise principalement sur les bombes pour faire régner la terreur, 85% de ses attentats étant ainsi perpétrés.

Rares attentats-suicides

5% : part des attentats-suicides

Contrairement à la croyance populaire, l'Index 2014 du terrorisme global démontre que peu d'attentats-suicides surviennent. Non seulement ils sont rares, mais ils se limitent à quelques pays. Depuis 2000, pas moins de 90% de ces attentats se sont produits dans des pays du Moyen-Orient et du sud de l'Asie. La crainte des attentats-suicides pourrait toutefois s'expliquer par les lourds dégâts qu'ils causent. L'étude montre que ces attentats tuent en moyenne 11 personnes, contre 2 pour les autres types d'attentats terroristes. L'efficacité des attentats-suicides est toutefois limitée quand vient le temps d'assassiner une cible précise, relativisent les auteurs. Un peu plus de la moitié (56%) des attaques ont raté leur cible.



Beaucoup d'attention est accordée au terrorisme, mais l'Index 2014 du terrorisme global souligne que les gens ont 40 fois plus de chances d'être victimes d'un meurtre que d'une attaque terroriste. Même si les États-Unis ont été le théâtre du pire attentat terroriste, le rapport évalue qu'un Américain court 64 fois plus de chances d'être victime d'un meurtre. Les auteurs soulignent toutefois que les actes terroristes provoquent une plus grande onde de choc, suscitant la peur et entraînant souvent des conséquences économiques importantes.