Le pape François a dénoncé mercredi avec force les drames des civils dans les guerres en Syrie et Centrafrique, la traite des êtres humains et les persécutions religieuses, dans son premier message «urbi et orbi».

Contrairement à certaines attentes, Jorge Mario Bergoglio n'a pas annoncé mercredi qu'il se rendrait en Terre sainte en mai, le seul voyage prévu encore officieusement pour l'an prochain.

Le message le plus fort du pape argentin devant 70 000 personnes, assemblées place Saint-Pierre, a été pour la Syrie. «Le conflit en Syrie a trop brisé de vies, fomentant haine et vengeance», a-t-il dit.

«Que le Seigneur épargne au bien-aimé peuple syrien de nouvelles souffrances et que les parties en conflit mettent fin à toute violence et garantissent l'accès aux aides humanitaires», a-t-il réaffirmé depuis la loggia de la basilique, dans cette bénédiction transmise par les télévisions du monde entier.

Les bombardements de l'armée de l'air syrienne sur la ville d'Alep ont fait 410 morts, dont 117 enfants, en dix jours de raids, selon une ONG.

François a rappelé la journée de prière pour la paix en Syrie début septembre, à laquelle il avait appelé. Il s'était alors prononcé contre une intervention envisagée par les États-Unis et la France après l'usage vraisemblable d'armes chimiques par le régime Assad:

«Nous avons vu, a-t-il estimé, combien la prière est puissante! Et je suis heureux qu'aujourd'hui des croyants de diverses confessions religieuses s'unissent aussi à notre supplication pour la Syrie».

Le pape a espéré «une heureuse issue» dans les négociations palestino-israéliennes et condamné la violence dans «l'Irak bien-aimé, frappé par de fréquents attentats».

Au moins 35 personnes sont mortes dans l'explosion d'une voiture piégée sur un marché où se côtoyaient chrétiens et musulmans dans la capitale irakienne. L'explosion qui a frappé le quartier de Doura, aurait également fait plus de 50 blessés.

François a lancé un appel insistant pour la Centrafrique, «souvent oubliée des hommes», «terre déchirée par une spirale de violence et de misère, où beaucoup de personnes sont sans maison, sans eau ni nourriture, sans le minimum pour vivre».

Il a appelé à «favoriser la concorde au Soudan du Sud» et cité les «continuelles attaques» au Nigeria, aux prises avec l'islamisme radical de Boko Haram, et les déplacés en RD Congo et dans la Corne de l'Afrique.

François a dénoncé particulièrement le fléau --fréquent en Afrique-- des enfants soldats «volés de leur enfance» et la mort de nombreux enfants dans les guerres, mais aussi des femmes, des malades, des personnes âgées.

Sa voix s'est élevée également pour demander «la protection de tous ceux qui sont persécutés à cause du nom» du Christ, faisant allusion aux persécutions qui tuent au moins chaque année 9000 chrétiens, toutes confessions confondues, selon des estimations concordantes des ONG.

L'archevêque de Cantorbery, Justin Welby, chef spirituel des quelque 85 millions d'Anglicans, a dénoncé, dans son message de Noël, «les injustices croissantes» visant les chrétiens, «attaqués et massacrés» au Moyen-Orient.

Le président américain Barack Obama a pour sa part souligné, dans son message hebdomadaire, que cette année, pour la première fois depuis longtemps, de nombreux soldats américains, en activité ou récemment démobilisés, avaient célébré Noël chez eux, en famille.

«Pour de nombreux soldats ou vétérans récents, c'est peut-être la première fois depuis des années qu'ils ont passé Noël en famille», a-t-il dit. «En fait avec la fin de la guerre en Irak et la transition en Afghanistan, moins de nos hommes ou femmes en uniforme sont en danger», a-t-il ajouté.

À Jakarta, des centaines de chrétiens indonésiens ont protesté devant le palais présidentiel contre la fermeture de leurs églises sous la pression de musulmans fondamentalistes.

Le pape Bergoglio, très social au point d'être accusé par les ultras conservateurs américains d'être marxiste, a dénoncé le trafic d'êtres humains, «grave délit contre l'humanité», plaidé pour l'accueil des immigrants clandestins et pour le respect de l'environnement.

Ce message était le premier message «urbi et orbi» du premier pontife venant de l'hémisphère sud, populaire y compris dans certains milieux non croyants. Beaucoup espèrent au-delà de tout réalisme en son intervention pour débloquer des situations inextricables: guerre en Syrie, inégalités économiques mondiales, etc.

La veille, François avait mis l'accent durant la messe de minuit sur «la tendresse et la miséricorde» de Jésus à l'adresse des «marginalisés» et des pauvres.

Étant imprévisible, certains espéraient que François se rende le jour de Noël dans un foyer d'immigrés ou une soupe populaire.