Des militants des droits de l'homme d'Europe de l'Est, l'adolescente pakistanaise Malala, icône de la résistance aux talibans, et Bill Clinton figurent parmi les 259 candidats - un nouveau record - en lice cette année pour le prix Nobel de la paix.

Si la liste des candidats reste secrète pendant au moins 50 ans, les parrains peuvent rendre public le nom de leur poulain.

Grièvement blessée en octobre d'une balle dans la tête tirée par un taliban qui voulait la punir pour son engagement en faveur de l'éducation des filles, Malala Yousafzai, 15 ans, a les faveurs de certains experts.

«C'est une candidate qui incarne plusieurs causes : les droits des filles et des femmes, l'éducation, la jeunesse, la lutte contre l'extrémisme», souligne le directeur de l'Institut de recherche sur la paix d'Oslo (PRIO), Kristian Berg Harpviken, observateur attentif du Nobel.

Mais son jeune âge pourrait jouer contre elle, disent d'autres. «Ce serait un poids trop lourd à porter pour elle», estime Atle Sveen, un historien spécialiste du prix Nobel. «Elle est bien trop jeune même si les raisons de la distinguer sont faciles à comprendre».

«Linna Ben Mhenni (une blogueuse tunisienne citée parmi les nobélisables en 2011 à l'âge de 27 ans) avait quasiment craqué nerveusement quand elle avait été sélectionnée. Et puis elle deviendrait peut-être une cible encore plus privilégiée des fanatiques islamistes», explique-t-il à l'AFP.

Le prix sera attribué début octobre et remis le 10 décembre, date anniversaire de la mort de son fondateur, l'homme d'affaires et philanthrope suédois, Alfred Nobel (1833-1896).

Parmi les 259 candidatures figurent 50 organisations, selon l'Institut Nobel. Le précédent record remontait à 2011 avec 241 noms.

Parlementaires et ministres de tous les pays, professeurs d'université, anciens lauréats, membres de certaines organisations internationales et du comité Nobel, soit au total des milliers de personnes, sont habilités à déposer une candidature.

«La tendance est à la hausse, pas chaque année, mais presque», a déclaré à l'AFP le directeur de l'Institut Nobel, Geir Lundestad. «Cela reflète un intérêt croissant pour le prix».

Certains choix polémiques récents ont aussi pu contribuer à un regain d'attention, comme la distinction l'an dernier de l'Union européenne alors qu'elle traversait la crise la plus grave de son histoire et celle de Barack Obama en 2009 alors qu'il n'avait accédé à la Maison-Blanche que quelques mois plus tôt et que son pays était engagé dans deux guerres, en Irak et en Afghanistan.

Le comité Nobel pourrait cette fois-ci choisir de s'exposer aux foudres de Moscou en s'attaquant à la question des droits et des libertés en Russie, théâtre l'an dernier de la pire répression depuis la chute de l'URSS, selon l'ONG Human Rights Watch (HRW), ou au Bélarus, parfois décrit comme la «dernière dictature d'Europe».

«Il y a de nombreuses raisons de tourner les regards vers l'Europe de l'Est, et particulièrement la Russie», estime M. Harpviken. «L'évolution politique y est très, très préoccupante et c'est quelque chose qui n'a pas dû échapper aux membres du comité».

Des femmes comme Lioudmila Alexeeva, Svetlana Gannouchkina et Lilia Chibanova, pourraient alors être de solides candidates, de même que l'ONG Mémorial et le militant bélarusse Ales Beliatski, actuellement derrière les barreaux.

M. Harpviken a aussi noté des avancées dans les domaines de la paix ou du respect des droits fondamentaux dans des pays comme la Colombie, la Birmanie et les Philippines, sans qu'il soit nécessairement aisé de distinguer un lauréat particulier. Les chefs d'État colombien, Juan Manuel Santos, et birman, le réformateur Thein Sein, comptent parmi les candidatures connues.

Autres noms avancés l'ex-président américain Bill Clinton, Maggie Gobran, une Copte surnommée la «Mère Teresa» du Caire ou encore le médecin Denis Mukwege qui aide les femmes victimes de viols en République démocratique du Congo.

Selon la chaîne de télévision NRK, l'ex-soldat américain Bradley Manning, informateur présumé de WikiLeaks, la Kurde turque Leyla Zana et l'alliance Gavi pour la vaccination des démunis sont aussi en lice.