Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a adopté vendredi, à l'issue d'un vote serré et d'un vif débat, une résolution «historique» visant à promouvoir l'égalité des individus sans distinction de leur orientation sexuelle, une première au sein des instances onusiennes.

La résolution, saluée par des applaudissements, a obtenu 23 votes en faveur, 19 contre et trois abstentions à l'issue d'un débat houleux au cours duquel le groupe de pays africains, présidé par le Nigeria, a notamment accusé l'Afrique du Sud de s'aligner avec les pays occidentaux.

Présentant le texte, le représentant de l'Afrique du Sud, Jerry Matthews Matjila, a déclaré que «personne ne doit être soumis à la discrimination ou la violence en raison de son orientation sexuelle».

Cette résolution a-t-il ajouté «ne cherche pas à imposer certaines valeurs à des pays, mais à amorcer le dialogue» sur ce thème.

Mais les pays de l'OIC (Organisation de la conférence islamique), Pakistan en tête, se sont déclarés «sérieusement préoccupés par cette tentative d'introduire à l'ONU des notions qui n'ont aucune fondation légale dans la législation internationale des droits de l'homme».

«Nous sommes encore plus troublés par cette tentative de se focaliser sur certains individus sur la base de leurs attitudes ou de leurs intérêts sexuels», a poursuivi le représentant du Pakistan.

Le délégué du Nigeria, Ositadinma Anaedu, a attaqué l'Afrique du Sud, l'accusant d'avoir «rompu avec la tradition du groupe africain» de trouver un consensus avant de voter sur une résolution.

«Cela me fait de la peine parce que l'Afrique du Sud est le pilier de l'Afrique», a-t-il dit, affirmant être convaincu que «plus de 90% des Sud-Africains ne sont pas en faveur de la résolution».

«Il est intéressant que les pays occidentaux soient vos partenaires aujourd'hui», a-t-il ironisé.

Mais d'autres pays, dont les États-Unis, la France, le Mexique, le Brésil ou l'Argentine ont salué le vote, de même que les ONG de défense des droits de l'homme.

«C'est une percée», a estimé l'ambassadeur français Jean-Baptiste Mattei. «C'est la première fois au sein de l'ONU qu'on passe un texte aussi fort sous forme de résolution et de cette portée», a-t-il dit à l'AFP.

«C'est un débat très passionnel, a-t-il reconnu, évoquant la «forte réticence du groupe africain et de l'OCI pour traiter de ce thème». Mais, a-t-il ajouté, «il ne s'agit pas d'imposer des valeurs ou un modèle, mais d'éviter que des personnes soient victimes de discrimination ou de violences au seul motif de leur orientation sexuelle».

Pour sa part, la représentante des États-Unis Eileen Donahoe a estimé que la résolution «entre dans l'histoire de la lutte pour l'égalité et la justice».

«C'est un pas important vers la reconnaissance du fait que les droits de l'homme sont de fait universels», a-t-elle souligné.

La résolution relève notamment «que tous les êtres humains sont nés libres et égaux en ce qui concerne leur dignité et leurs droits et que chacun doit pouvoir bénéficier de l'ensemble des droits et des libertés (...) sans aucune distinction».

Elle demande également une étude sur les lois discriminatoires et les violences contre les personnes en raison de leur orientation et leur appartenance sexuelle.

Peu avant le vote, le représentant de l'ONG Amnesty International auprès des Nations unies avait qualifié l'adoption de cette résolution d'«historique».

«Elle sera la première résolution de l'ONU répondant aux problèmes de violation des droits de l'homme en raison de l'orientation et l'appartenance sexuelle», a notamment indiqué Peter Splinter.

Ce texte sera «très important pour les lesbiennes, les homosexuels, les bisexuels et les transgenres dans leur lutte pour une pleine reconnaissance de leurs droits», a-t-il dit à l'AFP.

Selon Amnesty International, l'homosexualité demeure interdite dans 76 pays.