L'un est poursuivi pour tentative de viol, l'autre pour recours à la prostitution de mineure. Si les accusations portées contre Dominique Strauss-Kahn et Silvio Berlusconi diffèrent, certains détectent des similitudes entre les deux affaires, allant parfois jusqu'à surnommer le chef du gouvernement italien «Berluskahn».

«Le parallèle saute aux yeux», affirme Chiara Volpato, philosophe et professeur de psychologie sociale à Milan, interrogée par l'AFP alors que le procès de Silvio Berlusconi dans l'affaire Rubygate reprend mardi.

«Dans les deux cas, si les accusations sont confirmées, c'est le pouvoir qui conduit à la déshumanisation de l'autre, ils ne voient dans la femme que l'instrument de leur propre plaisir», explique-t-elle. «Les femmes sont interchangeables, toute subjectivité leur est niée, on ne se préoccupe pas de ce qu'elles peuvent éprouver».

La philosophe Michela Marzano, chercheuse au CNRS (France), a vu également des similitudes. «D'abord l'abus de pouvoir: à partir du moment où on est au pouvoir, on pense tout pouvoir faire, être au-dessus des lois».

Dans l'affaire «Ruby», le chef du gouvernement italien est accusé d'avoir payé les prestations sexuelles d'une mineure. Il est également poursuivi pour abus de pouvoir, en ayant fait pression sur la police pour qu'elle libère la jeune femme, arrêtée pour vol.

Michela Marzano a également été frappée par «le machisme des réactions» en France où «les gens se sont focalisés sur DSK plutôt que sur sa victime présumée». «En Italie, la situation est particulièrement dégradée. Pour des raisons culturelles, les hommes s'enorgueillissent d'être machistes, mais la France doit aussi s'interroger», relève-t-elle.

La philosophe note aussi dans les deux cas une «victimisation» du coupable présumé. En France, une majorité de Français a immédiatement pensé que le directeur du FMI, donné vainqueur contre Nicolas Sarkozy par les sondages, était victime d'un «complot».

En Italie, M. Berlusconi répète à l'envi qu'il est victime des magistrats milanais, qualifiés de «talibans communistes» ou de «cancers à extirper», comme il l'a encore fait au G8 de Deauville.

M. Berlusconi, objet de nombreuses poursuites, n'a jamais été condamné définitivement, bénéficiant soit d'acquittement, soit de la prescription.

Pourtant, les accusations portées contre les deux hommes sont bien différentes.

«Dans le cas de Berlusconi, il n'y a pas de coercition, de violence sexuelle», estime Isabella Merzagora, criminologue, professeur à l'Université de Milan.

«Il n'y a aucun rapport» entre les violences imputées à l'ancien directeur du FMI et «l'arène orientale où des demoiselles sympathiques étaient ravies d'avoir un hôte aussi riche», a plaidé sur la Rai, Giuliano Ferrara, connu pour être un thuriféraire du Cavaliere.

À cet égard, Marco Travaglio, farouche opposant du magnat milliardaire des télévisions, invite Dominique Strauss Kahn à «déménager en Italie», dans un éditorial ravageur d'Il Fatto quotidiano intitulé «Berluskahn».

«Il n'y a qu'ici que vous aurez encore un grand avenir politique.... Le ministre de la Justice édictera une loi pour dépénaliser le viol et le Parlement dira que le tribunal n'est pas compétent, car Strauss Kahn a violé dans l'exercice de ses hautes fonctions institutionnelles», ironise-t-il.

Pour les différents chefs d'accusation qui lui ont été notifiés à New York, Dominique Strauss-Kahn, aujourd'hui placé en résidence surveillée, encourt de 15 à 74 ans de prison, Silvio Berlusconi trois ans pour sollicitation de prostituée mineure et dix pour abus de pouvoir. Tous deux clament leur innocence.