Toujours méfiants face à l'un des régimes les plus durs de la planète, les États-Unis envisagent cependant de reprendre langue avec la Corée du Nord, avec l'espoir que les sanctions aient quelque peu amolli Pyongyang.

«Quand on donne des coups de bâton à un âne, il est bon de s'arrêter de temps à autre pour voir si l'âne a changé de comportement», résume pour l'AFP Bruce Klingner, du centre de réflexion conservateur Heritage Foundation à Washington.

Les coups de bâton pleuvent depuis l'abandon du dialogue à Six (les deux Corées, les États-Unis, la Chine, la Russie et le Japon) par Pyongyang en avril 2009, faisant de la Corée du Nord l'exception à la règle de l'administration Obama consistant à tendre la main aux ennemis de l'Amérique.

En mai 2009, le régime de Kim Jong-il a repris ses essais nucléaires, écopant dans la foulée de nouvelles sanctions de l'ONU. En mars dernier, le naufrage meurtrier d'une corvette sud-coréenne, imputé à Pyongyang qui s'en défend, a encore fait monter la tension.

La marine américaine s'est livrée depuis à des manoeuvres en Mer de Chine. Et lundi, Washington a adopté un nouveau train de sanctions contre le dernier régime stalinien d'Asie.

Mais un nombre croissant d'analystes et de responsables jugent que le dialogue doit reprendre.

«Le consensus qui se fait jour est qu'il faut entrer en contact avec la Corée du Nord», rapporte Michael Green, un ancien de l'administration Bush qui enseigne aujourd'hui à l'université Georgetown.

«Une politique faite uniquement de sanctions, d'exercices militaires et de pressions présente un certain risque de pousser Pyongyang dans ses retranchements», explique-t-il.

«Cela peut faire manquer certaines occasions de tâter le terrain, à l'heure où des changements potentiellement profonds sont à l'oeuvre en Corée du Nord», ajoute l'expert, évoquant les préparatifs de transmission du pouvoir de Kim Jong-il à son fils Kim Jong-un.

L'ancien président Jimmy Carter, de retour de Corée du Nord où il a obtenu la libération d'un Américain, a été reçu mardi par la secrétaire d'État Hillary Clinton.

À Pyongyang, M. Carter n'a pas rencontré Kim Jong-il, mais le numéro deux nord-coréen, Kim Yong-nam, qui a exprimé le désir de reprendre le dialogue à Six sur le désarmement nucléaire de la péninsule.

Mercredi, l'émissaire chinois Wu Dawei et son homologue sud-coréen étaient aussi attendus au département d'État, quelques jours après une visite à Pékin de Kim Jong-il.

Pour reprendre le dialogue, la Corée du Nord doit d'abord «cesser son comportement provocateur et guerrier» et observer l'accord de 2005 troquant la fin des essais nucléaires contre une aide économique, a réitéré avant le rendez-vous Philip Crowley, le porte-parole de la diplomatie américaine.

«Si nous avons la preuve que la Corée du Nord va dans cette direction, nous serons ouverts à davantage de dialogue», a ajouté M. Crowley.

La Corée du Nord doit modérer son discours avant de reparler aux États-Unis, juge aussi Gordon Flake, de la fondation Mandfield, en soulignant que Washington redoute de légitimer les ambitions nucléaires de Pyongyang.

En attendant, observe Michael Green, l'administration Obama a évité de suivre les appels des «faucons» sud-coréens, qui espéraient une riposte plus dure encore au naufrage de la corvette Cheonan.