Le général américain Stanley McChrystal, chef des forces internationales en Afghanistan, est un ancien des «forces spéciales» longtemps habitué à manoeuvrer dans l'ombre, dont la carrière est sur la sellette après ses propos peu amènes envers la Maison-Blanche.

Le portrait que lui consacre le magazine Rolling Stone montre un général en roue libre, plaisantant aux dépens de nombreux responsables de l'administration à grand renfort d'expressions vulgaires avec ses collaborateurs, qui parlent de lui en l'appelant «le patron».

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Son équipe est formée d'un «assortiment de tueurs, espions, génies, patriotes, fins politiques et maniaques incontestés», écrit le journaliste Michael Hastings, qui signe l'article de Rolling Stone, et à qui le général confie: «je mourrais pour eux, et eux pour moi».

McChrystal a été l'artisan de la politique de renforts en Afghanistan, obtenant du président Barack Obama l'envoi de 30 000 hommes supplémentaires (il en réclamait 40 000). Mais il dit avoir trouvé «pénible» la longue période de réflexion précédant la décision du président Obama.

Le général ne fait rien pour cacher les tensions qui l'opposent à la Maison-Blanche, tensions qui s'étaient déjà manifestées l'automne dernier lorsqu'il avait critiqué les vues du vice-président Joe Biden sur la stratégie de contre-insurrection. Le président Obama l'avait alors convoqué à bord de l'avion présidentiel Air Force One pour le rappeler à l'ordre.

Les propos rapportés par Rolling Stone et qui lui valent aujourd'hui une nouvelle convocation à la Maison-Blanche, visent notamment M. Biden. À l'évocation de son nom, il demande en plaisantant: «vous avez dit: Bite Me? (va te faire voir, en anglais)».

Et le reste à l'avenant. L'ambassadeur américain en Afghanistan, Karl Eikenberry? Quelqu'un qui «veut couvrir ses arrières pour les livres d'histoire». L'envoyé spécial de l'administration Obama pour l'Afghanistan et le Pakistan, Richard Holbrooke? Un homme dont les courriels ne valent même pas la peine d'être lus.

Diplômé de la prestigieuse école militaire de West Point, Stanley McChrystal a brillamment gravi les échelons de la hiérarchie militaire, tout en étudiant à Harvard.

Issu d'une famille de militaires, l'homme grand et sec, qui ne prend qu'un repas par jour et dort très peu, a longtemps choisi de rester dans l'ombre, notamment, de 2003 à 2008, à la tête des forces spéciales, un corps militaire américain entouré de secret qu'il avait intégré dès 1980. Ces fonctions l'avaient placé en première ligne des opérations spéciales américaines en Irak comme en Afghanistan depuis 2001.

En Irak, il a été crédité de l'élimination du chef de la branche locale d'Al-Qaïda, Abou Moussab al-Zarkaoui, en juin 2006, tout comme de la tactique utilisée pour démanteler les cellules d'Al-Qaïda et celles soutenues par l'Iran en 2007 et 2008. Mais les forces spéciales ont aussi été mises en cause pour avoir torturé des prisonniers en Irak.

Lors de son entrée en fonction à la tête de la coalition internationale en Afghanistan, le général de 55 ans avait en particulier insisté sur la nécessité de «protéger les Afghans de toute violence» alors que les bombardements américains et leurs nombreuses victimes nourrissaient le ressentiment vis-à-vis des troupes étrangères.

Une politique qui lui vaut aujourd'hui de solides inimitiés parmi les officiers américains en Afghanistan, à en croire Rolling Stone: ils lui reprochent de mettre en danger la vie des soldats américains en restreignant le recours à la force, ce qui, selon eux, ne fait qu'enhardir les talibans.