Deux départements français d'outremer, la Martinique et la Guyane, ont rejeté dimanche par référendum un statut leur octroyant plus d'autonomie, signalant dans un climat social fragile leur volonté de conserver la tutelle protectrice de l'État français.

La Martinique (Antilles, 400 000 habitants) et la Guyane (Amérique du Sud, 200 000 habitants) devaient choisir d'adopter ou non le statut qui encadre la plupart des autres territoires d'outre-mer. Ce dernier permet des adaptations aux «intérêts propres» de chaque collectivité et éventuellement plus d'autonomie. Les électeurs ont dit non à 69,8% en Guyane et à 78,9% en Martinique (avec une participation respective de 48,16% et 55,35%), selon les résultats officiels.

Le référendum s'est tenu dans un contexte de fébrilité sociale, un an après des émeutes qui avaient embrasé pendant 44 jours une autre île française des Antilles, la Guadeloupe.

Les manifestations avaient fait tache d'huile, notamment en Martinique. Les habitants se plaignaient du coût de la vie et plus généralement de la répartition des richesses, selon eux encore massivement aux mains des descendants blancs des colons. Le mouvement avait révélé des tensions raciales.

Le taux de chômage dépasse largement les 20% en Martinique, paradis touristique et grande productrice de bananes, ainsi qu'en Guyane, territoire couvert d'une vaste forêt tropicale et qui abrite la base de lancement de la fusée européenne Ariane.

En dépit de transferts financiers massifs de l'État français, ces collectivités d'outre-mer restent à la recherche d'un modèle de développement économique.

Cette consultation avait été demandée par les plupart des élus locaux de ces deux départements alors qu'en Guadeloupe où une manifestation contre le coût de la vie a encore été organisée samedi, les élus ont préféré attendre un apaisement du climat social pour organiser un tel référendum.

Mais en Guyane et en Martinique, les partisans d'une autonomie accrue ne sont pas parvenus à convaincre les électeurs des vertus de celle-ci pour assurer plus efficacement le développement local.

Une bonne partie de la campagne s'est faite sur la peur de la perte de prestations sociales, notamment en Martinique, où la population est vieillissante.

Lors du référendum se sont exprimées aussi des craintes sur les importants fonds européens dont bénéficient aujourd'hui les deux départements d'outre-mer, «régions ultrapériphériques» de l'UE, et une peur de «largage» par Paris malgré les assurances données par Nicolas Sarkozy sur ce point.

«À plus de 80%, c'est un vote de panique», a réagi le sénateur DVG de Martinique, Claude Lise, partisan du «oui» au referendum. «Je pense que la Martinique, comme la Guyane, ont manqué un rendez-vous avec leur histoire et sont passées à côté d'une réforme qui aurait pu aider à mieux construire leur avenir», a-t-il déploré.

Le président français Nicolas Sarkozy a pris acte d'une «réponse négative claire» à ces référendums. «Ce choix traduit l'attachement des Guyanais et des Martiniquais à un statut qui soit proche de celui des collectivités de métropole, réaffirmant ainsi le lien étroit qui les unit à la République», a-t-il estimé.

La ministre de l'Outre-mer, Marie-Luce Penchard, a jugé que les électeurs avaient «souhaité clore pour longtemps» le débat sur une autonomie accrue.

Le changement de statut ayant été rejeté, un autre referendum sera organisé le 24 janvier. Il sera demandé aux Martiniquais et Guyanais de se prononcer sur une simplification administrative.