Furieux d'avoir été mis par Washington sur la liste noire des pays à surveiller de près, le Nigeria a proposé jeudi aux enquêteurs américains la vidéo du contrôle aéroportuaire le 24 décembre à Lagos du Nigérian qui a tenté de faire sauter le vol Amsterdam-Detroit le jour de Noël.

«Nous possédons des informations vidéo de l'aéroport MMA (Murtala Muhammed Airport) que nos homologues américains devraient venir voir et constater (ainsi) que nos agents de sécurité ont fait ce qu'ils devaient faire», a déclaré le ministre de la Justice Michael Aondoaaka devant des journalistes.

«Nous n'avons rien à cacher. Le jeune homme s'est présenté, il a passé le contrôle et on le voit sur la vidéo», a-t-il poursuivi en se référant à Umar Farouk Abdulmutallab, qui transportait dans ses sous-vêtements les explosifs destinés à faire sauter le vol 253 de la Northwest Airlines.

Il avait annoncé mardi qu'Abuja demandera son retrait de la liste noire américaine.

«J'ai assuré mon collègue l'Attorney général (ministre de la Justice) des États-Unis de notre totale coopération et que nous répondrons favorablement à toute requête relatives à l'enquête», a souligné le ministre nigérian.

L'auteur de la tentative d'attentat «est arrivé, il s'est dirigé vers la droite, puis a tenté d'aller vers la machine de contrôle (aéroportuaire) située sur la droite, puis a subitement changé d'avis et a tourné à gauche, enlevé ses chaussures et est passé sous le portique», a détaillé jeudi le ministre nigérian.

Les agents de sécurité de l'aéroport international de Lagos «ont fait tout ce qui est requis légalement pour que le Nigeria soit en accord avec les normes internationales» (en matière de sécurité), a-t-il encore affirmé.

«Nous n'avons pas de problème ici, c'est les États-Unis qui en ont un, leur système a failli», a déclaré mercredi à l'AFP un responsable de l'aéroport MMA, alors qu'à Washington les services de renseignements américains sont justement sur le grill.

L'administration américaine devait publier jeudi un rapport d'enquête partiel sur les carences de ses systèmes de renseignement et de sécurité après cet attentat manqué, revendiqué par Al-Qaeda.

Le rapport, expurgé des données classées secret défense, devrait provoquer «un certain choc» dans l'opinion selon le conseiller à la sécurité nationale de Barack Obama, le général James Jones, cité jeudi par le quotidien USA Today.

L'auteur de l'attentat manqué de Noël a été inculpé mercredi de «tentative de meurtre». Abdulmutallab risque 20 à 30 ans de prison pour chaque chef d'accusation, mais pas la peine de mort, selon le Département américain à la Justice.

L'affaire a très nettement refroidi les relations américano-nigérianes, Abuja étant étant pourtant un gros fournisseur en pétrole des États-Unis.

Mercredi, Abuja a haussé le ton jugeant son inscription sur la liste de voyageurs à surveiller susceptible de conséquences sérieuses.

Le gouvernement nigérian «estime que cette action peut potentiellement nuire aux relations bilatérales de longue date entre les États-Unis et le Nigeria ainsi qu'à la bienveillance dont jouissent les États-Unis au Nigeria», a déclaré la ministre de l'Information, Dora Akunyili, à l'issue d'un conseil des ministres.

Mardi, le chef de la diplomatie Ojo Maduekwe avait déjà convoqué l'ambassadrice américaine Renée Robin Sanders pour protester contre cette décision «inacceptable».

Et pour marquer sa détermination à agir, Abuja a annoncé jeudi que les auteurs «d'actes terroristes» seront condamnés à la perpétuité conformément à une loi anti-terroriste que le parlement débattra très prochainement. Une mesure qui s'appliquera aussi à ceux qui auront seulement partiellement préparé un tel acte sur le sol nigérian.