Le gouvernement irakien a arrêté des dizaines d'anciens insurgés sunnites reconvertis dans la lutte contre Al-Qaïda, signe que le temps de l'immunité offerte par les Américains était fini et que ces miliciens devraient désormais rendre des comptes à l'État.

Au total à Bagdad, quarante miliciens des groupes Sahwa («Réveil» en arabe) ont été arrêtés ces dix derniers jours, selon les forces américaines et irakiennes. Quinze ont été relâchés depuis.

«Les forces irakiennes ont arrêté dix membres des Sahwa, dont cinq chefs, sous l'accusation de terrorisme» à Dora dans le sud-ouest de Bagdad, a affirmé à l'AFP Mohammad al-Gartani, chef local des Sahwa. Parmi eux, figure un ancien général de l'armée de Saddam Hussein.

«Nous sommes inquiets pour l'avenir des Sahwa et nous ne savons pas où aller, car les forces américaines et irakiennes nous traquent et Al-Qaïda nous vise», a ajouté le chef des 2450 membres de Sahwa de Dora, qui fut une place forte d'Al-Qaïda durant de nombreuses années.

Parallèlement, à Ghazaliya, dans l'ouest de Bagdad, deux responsables des Sahwa avaient été arrêtés fin mars. L'un d'eux, l'ancien lieutenant-colonel de l'armée de Saddam Hussein, Raad Ali, a été relâché jeudi.

«Ils m'ont accusé d'avoir commis des actes terroristes, placé des bombes, kidnappé et assassiné. Mais après enquête, ils se sont rendus compte que toutes les informations étaient erronées et le juge a ordonné ma libération», a-t-il expliqué à l'AFP.

Le week-end dernier, après l'arrestation d'Adel Machhadani, chef des Sahwa du quartier pauvre de Fadel à Bagdad -qui fait l'objet de 80 chefs d'accusation, dont racket et meurtres-, des accrochages avaient éclaté et 28 personnes avaient été arrêtées.

Quatorze ont été libérées depuis, selon l'armée américaine. Un officier irakien a indiqué que désormais les Sahwa du quartier seraient désarmés.

Vendredi, l'armée américaine a annoncé avoir tué un homme et blessé deux autres qui plaçaient une bombe près de Taji, à 25 km au nord de Bagdad. Selon le commandement américain, les hommes, qui étaient armés, «appartiendraient aux Fils d'Irak», le nom donné aux Sahwa par les Américains.

Cette vague d'arrestations intervient au moment où le gouvernement, à majorité chiite, vient de s'assurer le contrôle opérationnel et financier des 92000 miliciens sunnites des Sahwa.

Le gouvernement entend leur faire comprendre qu'ils ne bénéficient plus de l'immunité offerte par les forces américaines pour les retourner contre leurs anciens compagnons d'armes.

Dans une interview à la chaîne publique Iraqiya, le Premier ministre Nouri al-Maliki a ainsi clairement rappelé aux miliciens qu'ils devaient agir sous le contrôle de l'État et que toute violation de la loi serait punie.

L'arrestation de Machhadani est «un message lancé à ceux qui prennent le chemin emprunté par les bandes criminelles» de Fadel, a-t-il averti. «Ils ne doivent pas imaginer que l'État n'est pas au courant de ce qu'ils font. Et le jour viendra où ils devront rendre des comptes à la justice».

Financés dans un premier temps par l'armée américaine, les Sahwa avaient fortement contribué à la baisse des violences en Irak amorcée au second semestre 2007.

L'annonce par le gouvernement que seulement 20% d'entre eux seraient intégrés dans les forces de sécurité avait provoqué la colère des miliciens. Les autorités ont ensuite promis que les 80% restant intègreraient la fonction publique en général.

Leur fin programmée a ravivé les craintes que certains d'entre eux regagnent les rangs de l'insurrection.