«Nous sommes au courant des infiltrations des rebelles» et «s'ils essayent de nous provoquer, ils auront leur sort», martèle le commandant d'une brigade de l'armée congolaise dont les forces font face à celles des rebelles sur une ligne de front près de Goma.

«Nous sommes au courant des infiltrations des hommes du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple, dirigé par Laurent Nkunda) vers Kibati (15 km de Goma) à travers la brousse», déclare John Kibangu, commandant de la 18e brigade intégrée des FARDC (Forces armées de la République du Congo).

«Nous sommes prêts à nous défendre, s'ils essayent de nous provoquer, ils auront leur sort», ajoute cet officier dont les hommes sont positionnés sur la ligne de front de Kimanioka, localité située à côté de Kibati.

Aux portes de Goma (capitale de la province du Nord-Kivu), la ligne de front de Kibati - qui était considérée comme un des points chauds de la guerre - est en quelque sorte figée depuis le cessez-le-feu unilatéral du CNDP, fin octobre.

Mais l'armée congolaise a mis en garde mardi contre un «risque d'affrontement imminent» avec les rebelles dont le chef, Nkunda, a pourtant promis un «moment tranquille» à l'occasion des fêtes de fin d'année.

Forces armées du FARDC et rébellion s'accusent depuis samedi d'opérer des mouvements de troupes près du camp de déplacés de Kibati, à 15 km au nord de Goma.

La crainte d'une reprise des affrontements s'est également répandue parmi la population de Goma (environ 500.000 habitants), déjà éprouvée par les récents combats, et qui joue sa survie économique face aux taxes imposées sur des produits de première nécessité par des hommes du CNDP.

Goma est située à seulement une quinzaine de kilomètres du front. Or les riches terres agricoles sont essentiellement situées de l'autre côté, en zone rebelle.

Le président de la société civile du Nord-Kivu, Jason Lumen, ne fait pas confiance aux hommes de Nkunda, qui ont infligé de sérieux revers à l'armée congolaise et qui se sont arrêtés fin octobre aux portes de Goma, sur les rives du lac Kivu, face au Rwanda.

«Nous vivons dans un climat permanent de peur car le CNDP est en train de renforcer ses positions à Kibati et à Kimoka (30 km au sud-ouest de Goma)», déclare ce responsable.

«Le CNDP, dit-il, prépare toujours la guerre, nous sommes dans l'inquiétude de ce qui pourrait arriver».

Partie à la recherche de son mari dans les rues de Goma «pour voir s'il a trouvé des sous pour les enfants» souffrant de «la malaria», une habitante, Florence Sihiwa, dit être «très inquiète» pour l'avenir.

«Je suis très inquiète à cause de la situation d'insécurité dans la zone et pour mes enfants qui ne mangent presque plus. Mon mari travaillait avant à Rutshuru mais maintenant il est avec nous» à Goma, ajoute cette mère de quatre enfants, vêtue d'un vieux pagne et portant un bébé sur son dos.

Le territoire de Rutshuru (80 km au nord de Goma), qui est aux mains des hommes de Nkunda et d'où proviennent notamment maïs, haricot et manioc, est ainsi la principale source d'approvisionnement de Goma.

Les taxes imposées par le CNDP ont fait exploser les prix des denrées alimentaires dans cette région, pourtant considérée comme le grenier à blé du pays.

Le président du marché local, Fortin Kambale, dénonce la «situation créée par les hommes de Nkunda».

«Nous savons, dit-il, que le CNDP renforce ses positions autour de Goma. Cela nous inquiète et en plus les prix ont explosé sur les marchés et les gens n'achètent plus qu'au compte-goutte». «Le CNDP a fixé des droits de douane faisant augmenter les prix et c'est la population qui en souffre».

Lors d'une visite mardi à Rusthuru, Nkunda avait affirmé se battre «pour le développement» et «pas pour l'argent».