Si vous allez dans un complexe hôtelier de luxe au Belize, en Amérique centrale, ne comptez pas trop manger des spécialités locales. Au menu, on vous offrira plutôt de la pieuvre importée de Thaïlande ou du saumon de Norvège.

«Le pays a produit beaucoup de bois d'acajou pour l'exportation et a déboisé une importante partie de ses terres», explique Richard Wilk, professeur d'anthropologie à l'Université de l'Indiana. Pour se nourrir, les Béliziens peuvent compter sur des produits bon marché qui viennent des quatre coins du monde. Dans ce pays exotique, on mange donc de la salade de fruits en conserve qui vient d'Hawaii ou des légumes préparés et congelés, en sac, destinés au micro-ondes.

 

Le Belize est un pays parmi plusieurs autres qui ont préféré miser sur l'importation pour se nourrir parce qu'ils n'arrivaient pas à produire au même bas prix que ce qui se fait dans des superpuissances agricoles. «C'est impossible d'entrer en concurrence avec les États-Unis, qui ont d'énormes subventions pour faire du riz», explique le professeur Richard Wilk, qui est à Montréal pour participer à un important colloque de l'Université McGill sur les défis de l'alimentation.

Selon ce spécialiste, il est minuit moins une pour ces pays qui dépendent de l'importation pour nourrir leur population. Et la crise aura au moins ceci de bon qu'elle est le choc qui permet de se rendre compte que manger de la pieuvre asiatique dans un pays au bord de la mer est une énorme absurdité.

Mais en plus de changer les méthodes agricoles désuètes, il faudra changer les moeurs, explique Richard Wilk, qui a vécu un an au Belize. L'alimentation locale, dans un pays qui se développe, est un peu perçue comme l'alimentation des pauvres à côté du riz blanc, du sucre ou du porc salé qui sont venus avec les colons. Il faut maintenant revenir en arrière. «Ces pays doivent se demander ce qu'ils peuvent produire d'unique», explique l'anthropologue. Une fois que cette nourriture sera produite, il faudra la garder dans le pays - c'est la meilleure protection contre les crises futures.

Des experts internationaux discuteront de ces importants sujets aujourd'hui et demain. Le colloque montréalais De la crise à une nouvelle convergence de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la santé est soutenu par la Fondation Bill et Melinda Gates et il s'intéresse aux trois crises alimentaires.

La première, qui a défrayé la chronique cette année, est le déséquilibre des échanges de denrées d'un pays à l'autre, qui place maintenant plusieurs États dans une situation d'insécurité alimentaire. La deuxième est l'épidémie d'obésité qui touche de nombreux pays.

La troisième, la crise de salubrité des aliments, est un sujet on ne peut plus d'actualité après les récentes contaminations d'oeufs et de produits laitiers chinois à la mélamine.