Le gouvernement et l'opposition ont renoué le fil du dialogue en Bolivie, faisant naître l'espoir d'une issue pacifique à la grave crise politique qui a placé le pays andin au bord de la guerre civile.

«Le gouvernement se présente avec une ample prédisposition à discuter des questions de fond», a annoncé le vice-président Alvaro Garcia, depuis le palais présidentiel de La Paz, où ont commencé les pourparlers dans la soirée.

La Bolivie est secouée depuis plusieurs jours par une vague de violences dans cinq régions (Santa Cruz, Pando, Beni, Tarija et Chuquisaca) dirigées par l'opposition libérale, en conflit ouvert avec le président socialiste Evo Morales.

De graves affrontements entre les partisans et les adversaires de M. Morales ont fait au moins 18 morts et une centaine de blessés au cours de la semaine dans la région de Pando, dans le nord du pays, où règne la loi martiale depuis trois jours.

Le vice-président bolivien a toutefois averti que le gouvernement n'allait pas «négocier les morts», rappelant qu'un mandat d'arrêt a été émis à l'encontre du gouverneur de Pando, Leopoldo Fernandez, accusé d'avoir violé l'état de siège.

M. Fernandez est en outre accusé par le gouvernement d'avoir organisé un «massacre» de paysans fidèles au chef de l'Etat, dans la localité de Porvenir, où seize personnes ont été tuées jeudi.

Le ministre bolivien de la présidence, Juan Ramon Quintana, a assuré que les «auteurs de ce massacre finiraient à Chonchocoro», une prison de haute sécurité située dans le haut plateau bolivien.

Une commission d'enquête devait être dépêchée sur place. Le gouverneur de la région, qui avait publiquement refusé de respecter l'état de siège, avait démenti les rumeurs selon lesquelles il projetait de fuir au Brésil.

D'importants renforts militaires ont été envoyés à Cobija, la capitale régionale, pour rétablir l'ordre et reprendre le contrôle des bâtiments publics qui avaient été occupés par des groupes armés.

Le porte-parole de l'opposition, Mario Cossi, gouverneur de la région de Tarija, s'est rendu en fin d'après-midi au palais présidentiel, où il doit débuter les négociations avec des délégués du gouvernement.

Un peu plus tôt dans la journée, des représentants de l'opposition avait fait un geste, en annonçant la suspension des manifestations et des blocages routiers.

Les régions d'opposition, qui détiennent les principales richesses naturelles, réclament une plus large autonomie et notamment la gestion du lucratif impôt sur les hydrocarbures.

Elles rejettent aussi le projet de Constitution socialiste et de réforme agraire que M. Morales, premier président amérindien, veut faire adopter par référendum dans ce pays de 10 millions d'habitants, le plus pauvre d'Amérique du sud.

La crise a ravivé les tensions ethniques dans ce pays divisé entre les partisans du chef de l'Etat, en majorité des paysans pauvres des Andes, et la population métisse ou blanche qui vit dans les plaines de l'est et du sud.

Elle a aussi pris une dimension internationale avec le renvoi de l'ambassadeur américain à La Paz, accusé d'avoir soutenu l'opposition.

Juste avant son expulsion, l'ambassadeur américain Philip Goldberg a averti dimanche que son départ aurait des «conséquences sérieuses» pour la Bolivie, reprochant à M. Morales de n'avoir pas «évalué correctement» la mesure de son

renvoi.

Les Etats-Unis versent annuellement une aide de plus de 100 millions de dollars à la Bolivie, troisième pays producteur de cocaïne après la Colombie et le Pérou.

La réunion extraordinaire de l'Union des Nations sud-américaines (Unasur), prévue lundi au Chili, tentera de confirmer l'apaisement de la crise bolivienne.