Reclus dans l'obscurité de leurs habitations aux volets fermés ou aux fenêtres barricadées, sans électricité et sans eau courante, des Havanais résignés espéraient mardi que l'ouragan Ike épargne de ses destructions leur ville.

Des pluies intenses et des rafales de vent atteignant 120 km/h fouettaient les rues désertes de la capitale cubaine de 2,2 millions d'habitants, placée en état d'alerte maximal pour Ike.

Cette mesure exceptionnelle décrétée par la Défense civile équivaut à instaurer un couvre-feu dans la ville alors que toute circulation en véhicules ou à pied dans les rues y est depuis lundi soir interdite sans autorisation.

«C'est comme être enfermé dans une caverne. Mais il est préférable de rester dans la maison. Sortir dans la rue peut être très dangereux», estime Kenya Gonzalez, une Havanaise de 36 ans, qui refuse «de se laisser aller au désespoir».

«Ca va finir par passer. Encore un jour», dit cette employée d'une crèche en «congé forcé» pour Ike qui devait quitter Cuba mardi vers 19h00 GMT en direction du Golfe du Mexique.

Écoles, magasins, restaurants, tout bien sûr était fermé dans la ville où l'électricité était depuis lundi coupée pour éviter des accidents, entraînant du même coup l'arrêt de la distribution d'eau courante. Seuls les hôpitaux continuaient à fonctionner normalement grâce à des groupes électrogènes.

«Nous sommes fermés, le cuisinier n'est pas là et il n'y a de toute façon plus rien à manger. Tout ce qu'on peut vous offrir c'est un peu de rhum», dit en souriant un serveur qui explique se sentir plus en sécurité au restaurant Mercurio, où des panneaux ont été installés aux fenêtres, que chez lui dans la Vieille Havane.

Quelque 240 000 Havanais ont été évacués de zones risquant d'être inondées, dont 20.000 dans la Vieille Havane.

Outre des inondations qui se sont déjà produites lors notamment du passage de Wilma en 2005, certains édifices de ce quartier historique sont dans un piètre état et pourraient ne pas résister à de puissantes rafales de vent, selon la Défense civile.

Des vagues immenses envahissaient, non loin de là, le Malecon, le plus célèbre boulevard de la ville qui s'étire sur 8 kilomètres le long de la mer.

Mais quelques touristes s'y étaient quand même aventurés pour prendre des clichés, réussissant temporairement à déjouer l'attention des policiers qui patrouillaient les rues pour demander à la population de rester chez elle.

Dans une cafétéria de la Rampa, coeur culturel de la ville, Angel René, 40 ans, rongeait son frein, comme de nombreuses personnes appelées à veiller sur de petits commerces, souvent ouverts aux quatre vents.

«Nous devons rester ici avec ou sans électricité, qu'il vente ou non, car il faut protéger les installations de la cafétéria», moins contre les voleurs que contre les infiltrations d'eau, dit cet homme.

Roman Martinez, un maçon de 36 ans, estime que Ike a frappé fort Cuba et l'a fait «dans un contexte très difficile après Gustav», un ouragan 16 fois plus puissant que Ike qui a fait, selon les autorités, pour plus de 3 milliards de dollars de dégât le 30 août dans l'ouest du pays, mais sans faire de mort.

Ike a fait jusqu'ici quatre morts, une première pour l'île communiste depuis le passage de l'ouragan Dennis en 2005. Ike a en outre endommagé ou détruit des milliers de maisons, surtout dans l'est du pays, et entraîné l'évacuation totale de deux millions de personnes.