Le premier ministre thaïlandais Samak Sundaravej a refusé jeudi de démissionner ou de dissoudre le Parlement en dépit de l'aggravation de la crise politique, passant au contraire à l'offensive contre ses adversaires qu'il a comparés à une «secte radicale suicidaire».

Pour sortir de l'impasse, le gouvernement a lancé l'idée d'un référendum national mais il n'est pas certain que ce projet se matérialise, chacun campant résolument sur ses positions, estiment des analystes.

Le ministre des Affaires étrangères Tej Bunnag, conseiller du roi devenu chef de la diplomatie thaïlandaise il y a à peine six semaines, a présenté sa démission mercredi, fragilisant davantage la position du gouvernement, malmené par des manifestants qui occupent depuis dix jours le complexe qui abrite les bureaux du premier ministre.

À la radio, M. Samak a confirmé jeudi qu'il avait accepté la démission de M. Tej, diplomate de carrière qui, a-t-il dit, était «sous la pression de nombreuses parties».

En dépit de la crise qui risque de durer, Bangkok affirme pouvoir organiser en décembre le sommet annuel de l'Asean (Association des nations d'Asie du Sud-Est).

Jeudi, le premier ministre est resté extrêmement ferme. «Je ne démissionne pas. Je ne dissoudrai pas la chambre (basse du Parlement). Je dois rester pour préserver la démocratie et protéger la monarchie», a-t-il affirmé.

Depuis le 26 août, des milliers de manifestants royalistes défient le pouvoir en campant sur les pelouses de «Government House» à Bangkok. Ils exigent la démission de M. Samak qu'ils accusent d'être une «marionnette» de l'ancien homme fort de la Thaïlande, Thaksin Shinawatra, renversé par un coup d'État en 2006 et réfugié en Grande-Bretagne à la suite d'accusations de corruption et d'irrespect envers la monarchie.

Mardi, M. Samak, 73 ans, devenu premier ministre en février à l'issue des premières élections législatives depuis le putsch, a décrété l'état d'urgence dans la capitale après de violents affrontements entre partisans et adversaires du gouvernement, qui ont fait un mort et 44 blessés.

M. Samak a chargé le chef de l'armée, le général Anupong Paojinda, de rétablir l'ordre mais celui-ci a donné l'impression de ne pas vouloir s'immiscer dans le conflit, prônant «des négociations» plutôt que le recours à la force.

«Pourquoi démissionnerai-je?», a lancé M. Samak à la radio. Il a qualifié «d'illégale» l'Alliance du peuple pour la démocratie (PAD), rassemblement hétéroclite de royalistes, de syndicalistes, d'hommes d'affaires et de représentants des élites traditionnelles de Bangkok, à l'origine du mouvement de contestation.

«La PAD ressemble à une secte radicale suicidaire», a affirmé M. Samak. «Notre pays doit disposer de loi et d'ordre. Sinon, c'est l'anarchie».

Réagissant à cette intervention, le fondateur de la PAD, Sondhi Limthongkul, a refusé de céder et d'ordonner le départ de ses partisans. «Nous n'irons nulle part tant qu'il (Samak) reste (à son poste)», a-t-il dit, ajoutant: «Ce gouvernement, c'est de la foutaise».

La PAD, coalition extra-parlementaire représentant divers groupes de la société civile, s'est déclarée hostile à toute démocratie populaire qui, selon elle, encourage «la corruption» et «l'achat de voix» lors des élections. En juillet, elle a proposé un nouveau système politique dans lequel 70% des parlementaires seraient nommés, et non élus.

Le royaume de Thaïlande, qui a été le théâtre de 18 coups d'État depuis 1932, est profondément divisé entre des régions septentrionales et rurales, qui restent favorables à M. Samak et à l'ex-premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, et des régions méridionales plus urbanisées qui leur sont majoritairement hostiles.