Comme au Canada ou aux États-Unis, les étrangers désirant acquérir la nationalité allemande doivent depuis lundi passer un test de connaissances sur l'histoire et le système politique allemands, une mesure dont l'efficacité est déjà mise en doute.

Chaque candidat à la nationalité allemande, qui ne dispose pas d'un diplôme sanctionnant un parcours scolaire en Allemagne, devra désormais, outre les formalités d'usage, répondre à 33 questions portant sur «la vie en démocratie, l'histoire et la responsabilité, et les hommes et la société».

Il devra répondre correctement à au moins 17 questions de ce test de 60 minutes qui se présente sous forme de questionnaire à choix multiple et dont la mise en application a été confiée aux universités populaires. Pour chaque question, quatre réponses sont proposées.

Au total, les autorités allemandes ont élaboré un catalogue de 310 questions avec le concours d'un institut universitaire berlinois. Ce questionnaire est consultable sur Internet afin de permettre aux candidats de se préparer à cet examen d'un nouveau genre et des cours du soir seront proposés à ceux qui souhaitent s'y préparer.

Ce test, dont les frais de 25 euros sont à la charge du candidat, «est raisonnable et il est à la portée de tout le monde», avait assuré le ministre allemand de l'Intérieur, Wolfgang Schäuble, en présentant son projet.

L'idée d'instaurer un tel test a d'ailleurs été défendu par les deux grands partis au pouvoir, les sociaux-démocrates et les conservateurs, à un moment où l'Allemagne tente de faire évoluer sa politique d'intégration.

Pendant des décennies, le pays, traumatisé par les horreurs nazies, a accueilli sans discrimination des centaines de milliers d'étrangers, mais sans se soucier réellement de leur intégration.

Mais ce modèle dit «multikulti» a fait long feu, notamment lorsque l'Allemagne a découvert avec stupeur l'existence de «sociétés parallèles» qui ignorent l'allemand ou pratiquent les mariages forcés.

Quelque 6,7 millions d'étrangers vivent en Allemagne --sur 82 millions d'habitants--, dont 26,1% venus de Turquie, et plus d'un million de personnes ont acquis la nationalité allemande depuis 2000.

Néanmoins le bien-fondé de ce test est loin de faire l'unanimité. Des voix discordantes affirment que de nombreux Allemands seraient bien incapables de répondre aux questions.

Si certaines semblent ne pas poser de gros problèmes («Qui est le/la chancelier/chancelière de l'Allemagne?»), d'autres en revanche nécessitent une connaissance plus pointue ou ressemblent à s'y méprendre à un jeu de Trivial Poursuite.

«L'Allemagne est un État de droit. Qu'entend-on par là?», demande ainsi l'État à ses futurs citoyens. D'autres apparaissent presque stupides: «Quel droit est un droit fondamental en Allemagne? A. Posséder des armes, B. La loi du plus fort, C. La liberté de penser, D. Se faire justice...

Mais les autorités allemandes assurent que le but n'est pas de faire échouer les candidats. «Cela doit plutôt leur permettre d'aborder ces thèmes et d'acquérir les connaissances exigées sur l'État de droit, la société et les modes de vie en Allemagne», selon le ministère.

Le panel de questions étant connu à l'avance, il suffira aux candidats à la naturalisation d'apprendre les 310 réponses par coeur, expliquent aussi ses détracteurs.

«Apprendre par coeur, c'est typiquement allemand», critique le député social-démocrate (SPD), Sebastian Edathy. «Et celui qui peut démontrer qu'il en est capable a rempli une condition essentielle pour la naturalisation, mais ce ne doit pas être l'objectif de ce test».