Les dirigeants européens, unanimes à vouloir éteindre le brasier du Caucase, devaient décider lundi d'envoyer une mission d'observation du cessez-le-feu en Géorgie, en pariant sur un bon accueil de la Russie qui n'est pourtant pas garanti.

«Nous avons déjà une mission exploratoire sur le terrain d'une quarantaine de personnes, et nous aimerions déployer bientôt une nouvelle mission», a déclaré le diplomate en chef de l'Union européenne, M. Javier Solana, avant un sommet extraordinaire de l'UE consacré à la situation en Géorgie.

Dans leur projet de texte final, les dirigeants européens confirment leur volonté d'«un engagement renforcé de l'UE sur le terrain» et disent souhaiter «qu'une éventuelle décision d'engagement d'une telle mission d'observation puisse être prise dès le 15 septembre».

Selon M. Solana, cette mission, parallèle à celle de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) se déploiera «en plusieurs phases», d'abord dans le coeur de la Géorgie (régions séparatistes géorgiennes d'Abkhazie et Ossétie du Sud exceptées), pour «vérifier» que le plan en six points négocié avec les présidents russe et géorgien mi-août est respecté, et aussi «aux frontières».

Si le format, le mandat et les modalités pratiques de la mission sont entérinées à la date prévue, «l'objectif serait de déployer cette mission fin septembre début octobre», a indiqué à l'AFP un responsable de l'UE.

En principe, a-t-il noté, la mission devrait bien avoir vocation à intervenir dans toute la Géorgie, c'est-à-dire, aux yeux de l'UE qui ne reconnaît pas leur indépendance, aussi bien en Abkhazie qu'en Ossétie du Sud.

«En pratique, ce sera compliqué», a-t-il admis.

Que se passerait-il si Moscou tentait de monnayer l'extension du mandat de la mission de l'UE aux deux territoires contestés contre la reconnaissance de la souveraineté de leurs gouvernements pro-russes?

Cela serait évidemment contraire à l'intangibilité des frontières et à l'intégrité territoriale de la Géorgie que le sommet de l'UE devait hautement proclamer lundi.

Avant l'ouverture du sommet, un diplomate européen s'est voulu prudent sur le fond. «Certes, l'idée a un fort soutien des 27. Mais on n'en est pas encore à une mission d'observation aussi précise» que ça, a-t-il déclaré à l'AFP.

«Cela n'a» notamment «pas été discuté avec la Russie», a-t-il souligné. Certes, le président russe Dmitri Medvedev a semblé samedi favorable au déploiement d'observateurs de l'UE, mais, selon lui, leur objectif devrait être de surveiller les agissements de la Géorgie.

«Côté russe, il y a des signaux, mais cela reste compliqué et confus», a estimé ce même diplomate.

Quelle sera par exemple l'attitude de la Russie dans ce qu'elle a baptisé «zone de sécurité» où son armée a vocation à rester, et qui mord sur le territoire géorgien?

La définition de la mission de surveillance de l'UE «est un exercice d'une extrême souplesse», a reconnu ce diplomate, pour qui «il faut rester pragmatique et souple pour s'adapter à l'évolution de la situation».

La «mission exploratoire» présente sur place depuis une dizaine de jours a pour tâche d'examiner les modalités d'un engagement renforcé de l'UE en Géorgie.

Interrogé sur les limites à la fois territoriales et juridiques de cette initiative européenne, un responsable de l'UE a observé: «Nous verrons bien au sommet UE-Russie du 14 novembre à Nice». «Entre-temps, beaucoup de choses peuvent se produire; la mission n'est qu'un aspect du dialogue entre toutes les parties», a-t-il ajouté.

Pour le succès de sa mission en Géorgie, l'UE, qui ne veut pas parler pour l'instant de sanction contre la Russie, escompte visiblement que Moscou entendra le message et jouera l'apaisement d'ici à leur sommet.