Certains des soldats français tombés dans l'embuscade dressée lundi par des talibans en Afghanistan ont été «touchés» par les frappes aériennes de l'OTAN censées leur permettre de sortir de ce guet-apens, affirme mercredi le quotidien Le Monde, d'après des témoins.

Des soldats français blessés lors de l'attaque, interrogés mercredi matin à Kaboul par le journal, estiment en outre que le nombre de victimes s'explique par la lenteur de la réaction du commandement et de sérieux problèmes de coordination.

Les témoins remettent également en cause la version officielle de l'armée française donnée mardi selon laquelle la quasi-totalité des dix soldats tués l'ont été lors des premiers tirs ennemis, et affirment, d'après le journal, qu'ils ont trouvé la mort au cours des affrontements qui ont duré de longues heures.

Réagissant à ces accusations, le chef d'état-major de l'armée de terre, le général Elrick Irastorza, a estimé qu'il y avait «un temps pour la compassion, et un temps pour le retour d'expérience».

D'après les témoignages, les frappes aériennes de l'OTAN ont raté leur cible et touché des soldats français, de même que des tirs venant de soldats afghans positionnés en aval, écrit le journal.

Par ailleurs, l'unité de reconnaissance chargée d'approcher le col à pied est restée sous le feu ennemi «pendant près de quatre heures sans renfort», raconte un blessé. «Nous n'avions plus de munitions pour nous défendre avec d'autres armes que nos (fusils d'assault) Famas», ajoute-t-il.

«Parmi les attaquants il y avait des tireurs d'élite, ils étaient plus nombreux que nous et nous attendaient», a raconté un soldat au Monde.

Les corps des dix soldats devaient être rapatriés mercredi, et un hommage national leur sera rendu jeudi.

Il s'agit de la journée la plus meurtrière pour l'armée française depuis l'attentat, à Beyrouth en 1983, au cours duquel 58 parachutistes avaient été tués.

Le père de Julien Le Pahun, l'un des dix soldats tués, a mis en cause le gouvernement et réclamé des comptes au président Nicolas Sarkozy.

«Il faut que le gouvernement arrête d'envoyer des enfants se faire tuer, se faire trucider dans un stand de tir organisé car pour une première mission, c'était mission impossible. On n'envoie pas des enfants qui n'ont qu'un an de formation sur un front qui est horrible», a regretté Joël Le Pahun. Son fils allait avoir 20 ans mercredi.

M. Le Pahun a expliqué à l'AFP qu'il «ne compte pas en rester là» et qu'il demanderait au président de la République Nicolas Sarkozy «de (leur) expliquer ce qui s'est réellement passé car il y a beaucoup de questions».

«Je l'appelais quasiment tous les jours. Il avait très peur et la dernière fois que je l'ai entendu vendredi il m'a raconté qu'ils étaient passés dans un corridor et que s'il y avait eu des talibans, ils seraient tous morts. Je pense que c'est ce qui s'est passé lundi», a-t-il précisé.