Alors que la situation reste tendue en Géorgie, l'Ossétie-du-Sud, occupée par l'armée russe, se stabilise. Si bien que les Ossètes réfugiés en Russie commencent à reprendre la route de la maison.

Le petit autocar arrive au terminus de Vladikavkaz. Même s'ils possèdent déjà tous un billet, les réfugiés se bousculent à la portière pour obtenir les meilleures places. Le trajet s'annonce long jusqu'à Tskhinvali.

Depuis jeudi matin, 25 autocars quittent quotidiennement le terminus de la capitale de l'Ossétie-du-Nord, en Russie, pour celle de l'Ossétie-du-Sud. En trois jours, quelque 1500 Sud-Ossètes réfugiés à Vladikavkaz ont profité des autocars nolisés par le gouvernement pour retourner chez eux. Le camp temporaire d'Alaguir, à quelques kilomètres de la frontière entre les deux Osséties, est aussi en train de se vider.

Il n'y a qu'un peu plus de 200 km entre Vladikavkaz et Tskhinvali, mais le trajet peut durer plus de cinq heures. L'unique poste frontalier ouvert laisse passer les voyageurs au compte-gouttes alors que les camions militaires, d'aide humanitaire et de reconstruction s'ajoutent aux voitures et autocars de réfugiés.

«Je ne lui ai pas donné la permission, mais elle y va quand même.» Saïda Kodoeva n'aime pas trop voir sa mère de 60 ans retourner dans la capitale dévastée par les bombes dans la nuit du 7 au 8 août. Même s'il n'y a plus d'eau courante, d'électricité et de provisions autres que celles fournies par les autorités, Evguenia Koudzieva tient absolument à aller aider son mari à réparer leur maison, en périphérie de Tskhinvali.

«Toutes nos vitres ont été cassées par les explosions», explique la dame en montrant ses paquets -des vitres de remplacement et des provisions. Elle considère tout de même qu'elle a de la chance, car sa maison n'a pas été complètement rasée.

12 km à pied

Lorsque Ira Bitieva et son mari, Guiorgui Tidiev, ont quitté Tskhinvali, les troupes géorgiennes y étaient toujours. Les Russes étaient aux portes de la ville. Après trois jours dans la cave, ils en ont eu assez. «J'ai dit: Allez, on part! raconte Ira. Nous avons pris de l'argent, nos passeports et c'est tout.»

«Quand nous sommes partis, quatre maisons brûlaient dans notre rue», ajoute Guiorgui. À 60 et 69 ans, sa femme et lui éprouvent tous deux des problèmes cardiaques. Ils ont tout de même dû «ramper et marcher» pendant un jour et demi. Ils ont parcouru ainsi une douzaine de kilomètres dans la forêt, sous les bombes, jusqu'au village de Zari. De là-bas, un véhicule d'urgence russe les a emmenés à Vladikavkaz, où habite leur fils.

«Nous allons remettre la maison en ordre», dit Ira. «C'est dangereux de se faire voler s'il n'y a personne», ajoute Guiorgui. Selon les voisins auxquels ils ont pu parler, les pillards n'ont pas encore visité leur demeure. Seules les fenêtres ont été endommagées par les détonations.

Les «sauveurs» russes

Marek Khougaev n'a pas eu autant de veine. «En 1991 (durant la guerre d'indépendance), tout avait été détruit. Et là encore, le village est rasé», rage le commerçant de 47 ans.

Mais la perte de sa maison représente bien peu en regard de la joie qu'il a de pouvoir enfin retourner dans son village d'Artsevi, à une quinzaine de kilomètres au sud de Tskhinvali, où il n'a pu remettre les pieds depuis 2004: lorsque Mikheïl Saakachvili a pris le pouvoir en Géorgie, les troupes géorgiennes bloquaient l'accès à ceux qui ne détenaient pas de passeport géorgien. «Les Russes sont nos sauveurs!» lance-t-il.

Malgré l'instabilité de la zone où se trouve son village natal, Marek a bien l'intention d'y reconstruire sa maison. «Il n'y a rien de plus doux pour un homme que l'endroit où il est né, philosophe Marek. Ici, à Vladikavkaz, tout le monde est gentil avec moi. Mais ce n'est pas chez moi.»

Selon le Haut-Commissariat aux réfugiés de l'ONU, environ 118 000 Sud-Ossètes et Géorgiens ont été déplacés en raison des combats.