Le président sud-africain Thabo Mbeki, médiateur de l'Afrique australe au Zimbabwe, qui veut agir avec rapidité pour relancer le dialogue dans ce pays, n'a pas réussi samedi à convaincre l'opposition de participer à une table-ronde avec le président Robert Mugabe.

«Nous, l'équipe de facilitateurs (médiateurs), partageons l'avis des dirigeants du Zimbabwe sur le fait que nous devons agir avec une certaine rapidité», a déclaré le président Mbeki à la presse lors d'un passage éclair à Harare.

Thabo Mbeki a rencontré samedi au siège de la présidence son homologue zimbabwéen et les représentants d'une faction minoritaire du principal parti d'opposition zimbabwéen, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC).

Mais le leader de la branche principale du MDC, Morgan Tsvangirai -- qui a souvent accusé le président Mbeki d'être complaisant envers son homologue -- a snobé la table-ronde.

Le président Mbeki a assuré que le chef du MDC avait réclamé de rencontrer le président Mugabe et qu'il avait donné son feu vert vendredi à la réunion. «Malheureusement quand je suis arrivé à Harare, Morgan Tsvangirai a demandé un report de la réunion», a-t-il dit. «Mais j'étais déjà là.»

Le président sud-africain a expliqué que la réunion visait «à définir le cadre du dialogue» et a espéré que la suite du processus «aurait lieu avec le MDC-Tsvangirai».

«Nous n'avons pas participé parce que le contexte de la réunion n'était pas clair et en raison du lieu où elle s'est déroulée», a ensuite expliqué à l'AFP Nelson Chamisa, porte-parole du MDC.

«Mugabe insiste sur le fait qu'il est le leader légitime du pays et nous ne voulions pas envoyer de messages contradictoires», a-t-il ajouté.

Le MDC conteste la réélection de Robert Mugabe à l'issue d'un scrutin qu'il qualifie de «farce» électorale», et ne voulait donc pas être reçu par lui au siège de la présidence.

Morgan Tsvangirai, arrivé en tête au premier tour de la présidentielle, s'était retiré de la course en raison des violences contre ses partisans. Le régime avait maintenu le second tour, le 27 juin avec Robert Mugabe comme unique candidat.

Le ministre de la Justice, Patrick Chinamasa, un proche de Robert Mugabe, a ironisé sur l'absence de M. Tsvangirai. «Il a fait preuve d'un grand manque de respect en ne venant pas à la réunion», a-t-il lancé. Et d'assurer: «nous sommes favorables au dialogue, nous voulons mettre les divisions derrière nous.»

La veille, Robert Mugabe, 84 ans et au pouvoir depuis 1980, avait posé comme préalable à toute négociation la reconnaissance de son statut de chef de l'État. Une condition «inacceptable» pour le MDC de Morgan Tsvangirai.

Pour contourner ce veto, le régime pourrait désormais compter sur la faction dissidente du MDC d'Arthur Mutambara, qui semble plus malléable.

Un ancien porte-parole de cette branche minoritaire, Gabriel Chaibva, a en effet assisté à la cérémonie d'investiture de Robert Mugabe et a ensuite exhorté ses pairs à reconnaître la légitimité du chef de l'État.

Arthur Mutambara, qui a participé à la réunion samedi au siège de la présidence, a joué sur les deux tableaux. «Pour qu'un accord politique ait du sens, il faut que toutes les parties soient impliquées dans les négociations», a-t-il dit. Mais il a immédiatement relevé que son mouvement était «un parti politique séparé».

Le MDC s'était scindé en deux après un désaccord sur l'opportunité de boycotter les élections sénatoriales en 2005.

Lors des élections législatives du 29 mars, le MDC a raflé le contrôle de la chambre des députés, remportant 109 sièges sur 210. Dix des sièges du MDC sont détenus par des membres de la faction d'Arthur Mutambara, qui se sont engagés à travailler avec la branche majoritaire.