Le parquet polonais a ouvert une enquête sur l'existence présumée de prisons secrètes de l'agence des renseignements américains, CIA, sur le sol de la Pologne entre 2003 et 2005, a indiqué lundi le ministère polonais de la Justice.

«Je peux vous confirmer qu'une telle enquête est en cours, sans autres précisions car elle est affectée de la clause top secret», a déclaré à l'AFP le porte-parole du ministère, Grzegorz Zurawski.

Le porte-parole n'a pas précisé pourquoi le parquet, qui dépend directement en Pologne du ministre de la Justice, a lancé une enquête maintenant, alors que les premières accusations publiques contre la Pologne remontent à décembre 2005.

Les autorités polonaises ont jusqu'à présent rejeté fermement les affirmations du Conseil de l'Europe et les révélations de médias, notamment américains, selon lesquels des responsables de l'organisation Al-Qaeda ont bel et bien été détenus en Pologne par la CIA.

Dans un article paru en juin, le New York Times a cité de nouveaux témoins affirmant que Khaled Cheikh Mohammed, soupçonné d'avoir organisé les attentats du 11 septembre 2001, a été interrogé et torturé sur la base aérienne de Szymany dans le nord de la Pologne.

Selon le New York Times, la CIA a choisi la Pologne en raison de son assez grand éloignement du monde musulman et des risques moindres d'infiltration par le réseau d'Al-Qaeda.

Ces affirmations avaient aussitôt été démenties par Varsovie. «Il y a une campagne électorale aux États-Unis, il s'agit de démontrer que l'administration de George W. Bush, a, premièrement, utilisé l'Irak à ses propres fins politiques, et, deuxièmement, violé les normes internationales», a affirmé le ministre polonais de la Défense Bogdan Klich.

Le ministre avait aussi vivement critiqué un extrait de l'article, dans lequel un haut responsable de la CIA affirme que «la Pologne est le 51e état des États-Unis».

Tous les responsables polonais, quelle que soit leur appartenance politique, ont toujours nié les accusations portées contre la Pologne, même lorsqu'elles ont émané du Conseil de l'Europe l'an dernier.

Les dénégations des sociaux-démocrates, au pouvoir au moment des faits présumés, ont toujours été appuyées par le parti conservateur des frères Kaczynski et par les libéraux de Donald Tusk actuellement au gouvernement.

Un rapport publié en juin 2007 par le sénateur suisse Dick Marty, rapporteur spécial du Conseil de l'Europe, affirmait en revanche qu'il existait «suffisamment d'éléments pour affirmer que des centres secrets de détention gérés par la CIA ont bien existé en Europe, entre 2003 et 2005, notamment en Pologne et en Roumanie».

Après de premières accusations lancées en décembre 2005 par l'organisation américaine Human Rights Watch, le gouvernement conservateur avait fait procéder à une enquête. Mais contrairement à ce qu'il avait promis, il a ensuite refusé de la rendre publique.