Le chef de l'Etat mauritanien Sidi Ould Cheikh Abdallahi, premier président démocratiquement élu du pays, a été arrêté mercredi à Nouakchott au cours d'un coup d'Etat sans effusion de sang mené par le chef de la garde présidentielle qu'il venait de limoger.

Les putschistes se sont organisés en «conseil d'État», dirigé par le général Mohamed Ould Abdel Aziz.

«Je m'engage personnellement à préserver l'État de droit, les libertés des citoyens et les institutions démocratiques existantes», a dit le nouvel homme fort de Nouakchott dans une interview aux journaux suisse Le Temps et belge Le Soir.

Dans un communiqué lu à la radio nationale, la junte a promis une élection présidentielle «libre et transparente» dans «une période qui sera la plus courte possible».

Ce coup de force intervient 15 mois après l'élection présidentielle du printemps 2007, saluée comme un «modèle démocratique» pour l'Afrique et le monde arabe, et trois ans après le coup d'Etat militaire qui avait renversé en août 2005 le président Maaouiya Ould Taya.

Le général Ould Abdel Aziz, 52 ans, chef d'état-major particulier du président et commandant de la garde présidentielle, que le président avait démis de ses fonctions dans la matinée, est très vite apparu comme le chef des putschistes.

Peu après 09H00 (locales et GMT) à Nouakchott, «des membres de la garde présidentielle ont arrêté le président à sa résidence, et le Premier ministre Yahya Ould Ahmed Waghf à son bureau», a indiqué à l'AFP le porte-parole de l'institution présidentielle, Abdoulaye Mahmadou Ba. Ils ont été emmenés à la caserne de la garde présidentielle, tout comme le ministre de l'Intérieur, selon des sources sécuritaires.

«Cela s'est fait sans violence pour la bonne raison que ce sont des éléments putschistes qui assuraient la sécurité du président», a-t-il précisé.

Le président avait pris mercredi matin un décret nommant de nouveaux officiers à la tête de la garde présidentielle, de l'état-major national et de la garde nationale. «Trois généraux ont refusé d'obtempérer» et «sont entrés en rébellion», a commenté le porte-parole.

Le porte-parole de parlementaires «frondeurs», Sidi Mohamed Ould Maham, a appelé mercredi «tous les citoyens» à participer jeudi matin à Nouakchott à «une marche de soutien» aux putschistes et leur chef. «Nous soutenons le +mouvement correctif+», a-t-il dit au sujet du coup d'Etat.

Au même moment, le porte-parole du président renversé appelait la communauté internationale à «ne reconnaître en aucun cas» le pouvoir des putschistes, dans un entretien téléphonique avec le bureau de l'AFP à Dakar.

L'aéroport de Nouakchott, fermé mercredi dans la journée, a de nouveau ouvert dans la soirée. Aucune violence n'a été rapportée dans la capitale.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a dit regretter «profondément» le coup d'Etat, fermement condamné par l'Union africaine (UA), la Commission européenne et la présidence (française) du Conseil de l'Union européenne. Les Etats-Unis ont également condamné ce coup de force. La secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice a appelé les putchistes à libérer le président et le Premier ministre et à restaurer «immédiatement» le gouvernement légitime.

Le chef de l'Etat sénégalais Abdoulaye Wade a «conseillé» mercredi à la junte de «veiller» à la sécurité du président renversé et de ses proches.

Le parti du président renversé, le Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD) a, dans un communiqué, rejeté «totalement ce retour à l'ère des coups d'Etat».

De son côté, le principal parti de l'opposition, le Rassemblement des forces pour la démocratie (RFD), a «compris» ce coup de force.

Ancienne puissance coloniale, la France a souligné son attachement à la «stabilité» de la Mauritanie, pays pauvre en grande partie désertique, frappé depuis fin décembre par trois attaques de la mouvance d'Al-Qaïda et affecté par la crise alimentaire mondiale.

Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi et le président tunisien Zine El Abidine Ben Ali ont dépêché à Nouakchott le secrétaire général de la présidence tournante de l'Union du